Introduction
Dans une interview, en 2008, Henry Mintzberg affirmait : « Je pense que cela a été une grande erreur de séparer le leadership du management. La conséquence en est que l’on a maintenant des leaders qui ne sont pas managers. Aussi nous avons besoin de plus de management et de le combiner avec le leadership et de surtout ne pas les séparer… ».
Or, une enquête importante, menée en 2008 sur les principaux DRH des pays développés, a montré que le développement du leadership n’était pas une priorité majeure en France. Alors qu’il constituait une des trois principales priorités ailleurs (la première, en Chine et la deuxième, aux USA).
Les américains ont même créé un courant d’analyse du leadership, très impliqué dans le monde universitaire : les leaderships studies. On y décortique les fondements du leadership mais ces écoles tentent également de « former » les leaders. Une recherche sur Internet, en français, ne fait ressortir que quelques actions de formations, d’organismes privés, et aucun programme universitaire ; alors qu’on y trouve un très intéressant « manuel de formation des jeunes au leadership » composé au Sénégal (édité par la CONFEJES). Cette relative « myopie » française demeure paradoxale, dans un pays où les leaders ont souvent fait l’objet de suspicion mais aussi de vénération (voir, plus loin, les travaux de l’historien Jacques Marseille). Une recherche Internet sur le mot leadership (en français) donne 282 millions de réponses ! Ce mot « valise » est souvent employé mais rarement défini et fait l’objet de confusions et d’amalgames. On confond souvent, à tort, chef et leader et on postule qu’un manager est forcément un leader. Or, si Mintzberg milite pour la nécessaire prise en compte du leadership dans le management, on se rend compte que de nombreux managers tirent leur autorité d’autres sources que le leadership. A contrario, on peut être leader et n’occuper qu’une place insignifiante dans la hiérarchie d’une organisation. Certaines entreprises ont même détourné le terme (de manière astucieuse) pour rebaptiser leurs contremaîtres (les fameux « team leaders » en automobile) ou les leaders élus d’entreprises qui ont aplati la hiérarchie.
Ce n’est pas tant la définition qui pose problème mais plutôt l’analyse du leadership et la réponse à deux questions fondamentales :
- Comment devient-on leader ?
- Comment caractériser les leaders ?
La deuxième question pousse à établir des typologies parfois utilisées sans analyse. Nous orienterons donc notre article sur celles-ci pour tenter d’expliquer ce qui a conduit certains auteurs à produire ces typologies.
Nous pouvons partir d’une définition qui semble acquise, suivant les travaux de l’université d’Harvard : « Capacité d’orienter et de mobiliser durablement un groupe d’individus vers l’accomplissement de buts précis ». Cette définition basique ne permet pas de faire état des nombreux travaux sur le sujet, qui s’inscrivent souvent dans une perspective historique et scientifique, avec des apports des différents courants d’analyse du management et des organisations. Ainsi, la première approche a cherché à montrer que le leader rassemblait un ensemble de traits de personnalités (1). Cette approche par les traits (1.1), ancienne, est prolongée par des travaux récents qui l’implémentent de facteurs déterminants expliquant la trajectoire des leaders (1.2). Se sont ensuite succédées différentes approches scientifiques assez marquées (2), principalement les théories comportementales (2.1) et les approches par les styles (2.2). Plus récemment, trois approches majeures multidimensionnelles ont semblé se détacher (3) ; il s’agit de la théorie du leader charismatique et du leader transformationnel (3.1) et enfin de la prise en compte de l’environnement à travers les approches contingentes du leadership (3.2).
1. Le leader, des traits de personnalité et des déterminants de trajectoire spécifiques ?
A partir d’un présupposé simple : le leader possèderait des traits caractéristiques ; on pourrait être tenté de lister « à la Prévert » ces traits. Mais cette approche, bien qu’ancienne, repose sur une véritable analyse qui se prolonge aujourd’hui et se complète de théories insistant sur certains facteurs permettant de faire émerger le leadership.
1.1 L’analyse classique par les traits de personnalité, une approche basique
1.1.1. De la théorie des grands hommes …
L’approche est très ancienne, on pourrait même dire qu’elle serait aussi ancienne que l’humanité, qui a toujours compté des leaders (chefs de tribus, grands aventuriers, personnages historiques…). Le premier à l’avoir vraiment formalisée est Carlyle en 1840. Il s’agit de la théorie du grand homme, qui s’intéresse au culte du héros dans une perspective historique. L’auteur est un historien écossais et il s’attache à recenser, méthodiquement, les caractéristiques des grands hommes afin de pouvoir reconnaître les leaders potentiels. Ces héros sont manichéens et ils transforment la société, surtout les rois. La foule les suit. Carlyle va plus loin, jusqu’à postuler que l’héritage est génétique et héréditaire et fonction de la situation historique. Les grands hommes arrivent en période de crise pour donner la marche à suivre et orienter les personnes. Cette théorie reste androcentrique, car elle ne parle que des hommes et elle a été critiquée assez vite, en particulier par le sociologue Herbert Spencer. Il postule que certaines influences favorisent l’avènement des grands hommes et que c’est bien la société qui le produit.
Cependant, son attrait actuel est réel car elle favorise la croyance dans la surcapacité de certains leaders et entretient le mythe cher à certaines cultures d’entreprises fortes (américaines, souvent). Ce modèle du leadership « héroïque » revient sous les feux des projecteurs à l’occasion de graves crises et il est parfois entretenu par la presse « grand public ».
Il a même fait l’objet d’une extension récente en histoire économique, due à Jacques Marseille (2006). L’historien a avancé une théorie selon laquelle l’histoire de France s’articulerait autour de quatre maîtres qui ont joué un rôle fondateur et régulateur à travers leurs décisions. Il s’agit de Louis XIV, Napoléon I, Napoléon III et de Gaulle (deux fois). Ces « maîtres » arrivent au pouvoir à un moment difficile et « font tourner » l’organisation (Pavy, 2004). Pour Pavy, le maître représente le père lorsque le contremaître (le manager) n’est qu’un instrument du pouvoir. On peut alors se demander si le maître présente des traits spécifiques identifiés par une démarche scientifique.
1.1.2. L’approche par les traits de personnalité
Scientifiquement, c’est dans les années 60, que certains chercheurs vont tenter de lui donner un fondement solide. Geier tente un rencensement en 1967 (Geier, « A trait approach to the study of leadership in small groups », Journal of communication, 1967). Il met en avant cinq traits prégnants, qui sont revalidés par une étude de 1991 (les portants à sept). On retrouve :
- L’ambition
- L’énergie
- Le désir de diriger
- L’honnêteté et l’intégrité
- L’assurance
- L’intelligence
- L’adaptabilité et la compétence.
Cette théorie, toujours actuelle, est défendue par Kirkpatrick et Locke qui prétendent pouvoir distinguer les leaders des non leaders. Ils mettent en avant la volonté de réussir, l’ambition et la ténacité, ainsi que la capacité proactive des leaders. L’ensemble représente le « drive » qui est la capacité à commander. Les leaders sont également motivés, intègres et confiants en eux ; tout en étant stables émotionnellement. Ils sont également habiles et connaissent leur métier. Ce portrait « idéal » est consolidé par des travaux plus récents (Bolden en 2004, université d’Exeter) qui ajoutent à cette longue liste les qualités de sociabilité et motivation ainsi que certaines capacités renforcées (intelligence, facilité verbale).
1.1.3. Le modèle des big five
Une modélisation s’est avérée nécessaire pour pérenniser la théorie et l’utiliser au mieux, c’est celui des « big five ». Elle est énoncée dans les années 90 (Digman, 1990 ; Costa et Mc Rae, 1995). Elle postule que les individus sont structurés autour de cinq traits stables à travers le temps et les situations :
- Le névrosisme (adaptation par rapport à l’instabilité émotionnelle)
- L’extraversion
- L’ouverture
- L’agréabilité (qualité de l’orientation interpersonnelle de l’individu)
- Le caractère consciencieux.
Un inventaire de personnalité NEO-PI-R (Costa et McRae, 1995) permet de « scorer » les différents traits sous l’angle du full range leadership model. L’extraversion et l’agréabilité seraient des éléments prédictifs du leadership, ainsi que le caractère consciencieux. Dans le prolongement de cette approche s’est développé un courant qui met en avant les qualités d’intelligence émotionnelle du leader (Champy, 2003). L’empathie en serait la composante principale et permettrait de susciter la loyauté des subordonnés. Cependant, aucune étude sérieuse n’a permis d’établir le caractère réellement efficace de ce mode de leadership. Le caractère prédictif de ce modèle est aujourd’hui clairement établi mais on ne peut pas, par contre, distinguer les leaders efficaces et les leaders inefficaces (Lord,Devader et Alliger, 1986). Cependant, ce modèle reste pertinent car il est simple et permet d’expliquer l’attrait lié aux leaders. On peut lui reprocher un défaut majeur, c’est l’impossibilité de faire le lien entre le comportement des leaders et l’efficacité des collaborateurs ; ce qui a induit le développement des théories comportementales. Mais on pourrait aussi chercher à compléter ce modèle en l’étendant aux différents facteurs expliquant la trajectoire.
1.2 Les déterminants des trajectoires de leaders, une approche récente
Indépendamment des traits communs aux leaders, on pourrait aussi rechercher certains vecteurs ayant permis la réussite et les coupler avec les traits vus précédemment.
C’est ce qu’on fait certains sociologues, récemment, à l’aide d’études basées sur des interviews. L’une des principales est due à Denis Christol en 2010. Basée sur 158 portraits de leaders, elle cherche à identifier les déterminants des trajectoires et à les analyser pour répondre à la question : « Comment devient-on leader ? ». L’analyse des réponses permet d’identifier cinq facteurs explicatifs majeurs :
- Des évènements professionnels majeurs (des réussites et une expérience multiculturelle)
- Le cumul de diplômes prestigieux (80 % des leaders interrogés sont issus de 15 grandes écoles)
- Les appuis politiques
- Les réseaux professionnels
- La compétence et l’engagement professionnel.
De plus, certaines « combinaisons » entre ces facteurs et des trajectoires maximisent les chances d’accéder au leadership (Christol, 2010) :
- La preuve par le métier puis le sacre électif au sein d’une corporation (cas des leaders syndicaux)
- Le passage du conseil à la direction d’entreprise
- Le passage par un cabinet ministériel.
Il convient de mettre en relation les résultats (très « français », lorsqu’on voit la part du diplôme et des réseaux) de cette étude et la théorie des carrières professionnelles. La carrière est subjective (Bastid, 2004), car construite par le sujet à l’aide de choix. On revient à l’approche de Donald Super et les différentes théories liées à l’orientation professionnelle. Les valeurs personnelles, voire la morale personnelle, jouent un grand rôle dans cette orientation. On peut donc dire qu’en plus de traits communs, les leaders possèderaient des idéaux assez forts et un but à atteindre. La réussite de la trajectoire s’expliquerait par une très forte estime de soi et une image professionnelle valorisée (tant au niveau personnel que par les autres). Un autre lien théorique intéressant peut être fait avec les travaux de Bandura et la démarche constructiviste. Il développe la notion de « SEP » (sentiment d’efficacité personnelle) à travers la théorie sociale cognitive (Bandura, 1986). Selon lui, le comportement de la personne est en interaction avec son environnement et le regard des autres. Cette explication scientifique viendrait renforcer les thèses des journalistes économiques qui cherchent à nous présenter les leaders comme des personnes soucieuses de leur image et dont la réussite est corrélée à la valorisation de leur action. Le leadership se construirait donc, à partir d’une démarche consciente et élaborée, s’appuyant sur des traits de caractères identifiés et des facteurs les renforçant (diplômes, réseaux, responsabilités…).
Si cette approche reste actuelle, elle ne permet pas d’expliquer une partie importante du phénomène : il ne peut exister de leaders sans « followers », c’est-à-dire des gens pour les suivre. Ce qui a conduit les chercheurs à s’intéresser au comportement et au style des leaders, en relation avec ceux qui les soutiennent.
2. Le leader, des explications scientifiques orientées
Si de nombreux auteurs se sont consacrés à l’étude du leadership, il est parfois difficile de « classer » leurs travaux. Dans une logique historique, ce sont les théories comportementales qui ont succédé, d’abord, aux approches basées sur les traits de personnalité. Ces théories ont ensuite permis l’émergence de tentatives de typologie des leaders en fonction de leur style.
2.1 Les théories comportementales
Ces théories cherchent à distinguer les leaders des non-leaders sur la base de comportements spécifiques. Les premiers travaux dans ce domaine ont été menés aux USA par des universitaires du Michigan et de l’Ohio.
2.1.1. Les études de l’université d’Ohio
Elles débutent dans les années 40 et ont pour but d’identifier les différentes dimensions du comportement du leader (Stogdill et Coons, 1951). Après avoir recensé un millier de comportements, les chercheurs les ont classifiés et répartis à travers un modèle à deux dimensions : la structuration et la considération. La structuration est la capacité d’un leader à définir et structurer son rôle et celui de ses subordonnés en vue de l’accomplissement d’un but. Il s’agit d’attribuer et de répartir des tâches mais aussi des objectifs (comme ceux de la performance, par exemple). La considération est l’aptitude du leader à entretenir des relations de travail basées sur la confiance et le respect de ses subordonnés. Une étude récente a remis au goût du jour les préconisations de ces chercheurs. Selon des chercheurs en psychologie du travail à Palo Alto, en 1992, la considération va apporter de meilleures relations de travail quand la structuration sera pertinente en cas d’analyse des performances et d’objectifs de productivité.
2.1.2. Les études de l’université du Michigan
Les chercheurs de cette université ont voulu établir les comportements susceptibles de déterminer l’efficacité du leadership. Ils sont arrivés à un modèle toujours utilisé par certains consultants et basé, encore une fois, sur une approche bi-dimensionnelle. Certains leaders seraient centrés sur la production quand d’autres le seraient plus sur l’employé (Kahn et Katz, université du Michigan, 1960). Le leader « orienté employé » cherchera à mettre en place des relations interpersonnelles importantes en respectant les besoins des employés. Le leader « orienté production » sera intéressé par la technique et la productivité du travail. Là encore, le leader orienté vers les employés sera reconnu plus efficace, ce qui est cohérent avec les recherches et préoccupations de l’époque (domination de l’école des ressources humaines).
2.1.3. La grille managériale de Blake et Mouton
La représentation visuelle la plus connue, issue des travaux sur le comportement, est la grille bidimensionnelle de Blake et Mouton. Elaborée en 1964, elle est toujours très utilisée dans les ouvrages et enseignements de management. Sa simplicité et son intérêt expliquent ce succès. Les auteurs ont tiré une matrice autour de deux axes, répartis en 9 valeurs. On peut donc trouver 81 styles différents de leadership !
Source : Blake & Mouton, « The managerial grid », Houston
On pourrait, évidemment, penser que le style « 9.9 » est le plus efficace. Rien ne peut le prouver et il a d’ailleurs été taxé de « maximalisme », obligeant certains salariés à s’investir totalement avec des répercussions importantes sur leur vie privée. A ce titre, une intéressante étude sur la PJ parisienne a montré que ses commissaires représentaient souvent ce comportement maximaliste, demandant un engagement total aux policiers d’élites qui composent ce service. Il semblerait plus intéressant de promouvoir le style « 5.5 », ainsi nommé « équilibré » ; qui pourrait convenir dans toutes les situations. Une critique majeure est adressée à ces modèles, elle concerne l’environnement dans lequel s’exerce le leadership, qui n’est pas du tout pris en compte. En se focalisant sur le comportement du leader et celui du subordonné, cette école ignorerait l’impact de l’environnement extérieur sur le leadership et nierait l’existence de facteurs de contingence, à même de modifier ces comportements. Les approches par les styles ont, en partie, cherché à intégrer ces éléments. L’école scandinave, aux travaux récents, a réduit l’impact de cette critique en intégrant une dimension nouvelle au modèle comportemental.
2.1.4. L’école scandinave
Cette école, dont les travaux sont peu connus, a développé les modèles comportementaux en cherchant à savoir si un leadership fondé sur le développement de la personne pouvait entraîner des comportements d’innovation de la part des subordonnés. Ce développement suppose une approche intermédiaire qui inclut une certaine prise en compte des résultats. La théorie du développement introduit donc une troisième dimension au modèle comportemental. Dans les années 90, des chercheurs suédois et finlandais ont ainsi démontré que ce mode de leadership permettait d’inciter les membres de l’équipe à expérimenter et démarrer de nouvelles activités. C’est un apport intéressant car ces chercheurs ont pris en compte la dimension environnementale. D’une certaine manière, ces comportements de leadership étant préconisés en période de crise ou d’incertitude économique (Ekvall et Arvonen, 1991).
Figure originale, sans traduction, l’axe des abscisses représente l’intérêt porté au personnel et l’axe des ordonnées celui porté à la production.
2.2 Les approches par les styles
Ces approches tentent d’établir une typologie du leader afin de les distinguer et d’en montrer les intérêts et contraintes. On peut les rapprocher des modèles comportementaux mais les facteurs qui conduisent à établir la typologie ne sont pas toujours liés au comportement du leader ou des gens qui le suivent. Plusieurs modèles existent. Ils peuvent être plutôt « psychologiques » ou multifactoriels.
2.2.1. Les modèles psychologiques
On peut qualifier certains modèles de « psychologiques » car ils représentent des typologies de leaders fondées sur leur perception, en particulier par les collaborateurs qui travaillent avec eux. On retrouve donc des travaux de psychologues du travail ou de sociologues, souvent à l’origine d’écoles de pensée.
. Les types de pouvoirs des leaders par Max Weber
Dans son analyse sociale des rapports de domination (dans « l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme », 1904), Max Weber établit, historiquement, des formes de pouvoirs dévolues aux leaders :
- Leadership traditionnel : fondé sur la coutume et la tradition qui placent quelqu’un en position de chef. Ce chef adopte donc un style fortement influencé par les us et coutumes en s’appuyant sur les traditions. On peut prendre comme exemple certains chefs de tribus indiennes qui exercent leur leadership en utilisant des attributs de manière assez formelle (rites...).
- Leadership légal : fondé sur la loi qui légitime le pouvoir de la personne et donne une certaine surface à la fonction. Le leader ainsi intronisé va se servir de la loi pour dominer et même parfois la transformer dans son intérêt. On peut penser à certains souverains voire à des présidents au style « incarnant » la république. Le président français de la cinquième république est d’abord le garant des institutions et s’exprime souvent en s’appuyant sur la constitution et les lois de la république. Son « empreinte » de leader est liée à sa façon de gouverner et d’utiliser les pouvoirs octroyés par la constitution (par exemple, chef des armées). Dans un article récent, le psychiatre Jean Cottraux qualifie le président François Hollande « d’anxieux qui doit sortir de l’évitement », en tant que président élu d’un pays qui sombre dans l’anxiété (Le Point, 7/11/2013). Ainsi le caractère du président brouillerait le style habituellement attendu dans une telle fonction.
- Leadership charismatique : fondé sur le rayonnement de la personne, le leadership est lié à une forme de pouvoir personnel qui génère l’allégeance, le dévouement et même certains comportements de crainte.
. Le modèle de Lewin (1944)
Kurt Lewin est connu pour ses travaux sur la dynamique de groupe mais il a aussi contribué à l’analyse des différentes formes de leadership. Au MIT, il a créé le Research Center for Group Dynamics. Il a mené des expériences sur les enfants (en centres de loisirs) pour démontrer que les trois types de leaderships possédaient chacun des configurations différentes. Trois « conditions » se dégagent qui correspondent à des objectifs différents :
- Dans la condition « directive », l’animateur est directif dans sa passation d’ordres et ceux-ci ne peuvent pas être discutés (pas de rétroaction possible). Le leader se comporte donc en chef mais surtout avec une légitimité « paternaliste ».
- Dans la condition « participative », l’animateur est participatif avec tous les membres du groupe. L’apprentissage est basé sur l’interaction entre les membres du groupe et le leader facilite l’apprentissage.
- Dans la condition « laissez-faire », l’animateur est en retrait face aux demandes du groupe. Le groupe se régule seul et acquiert une autonomie.
. Les quatre styles de Bédard (2008)
Pour Renée Bédard, professeure à Montréal, il existe quatre styles de leaders. Cette approche est complémentaire de l’approche comportementale et permet de déterminer des archétypes de leaders complémentaires et coexistant dans les organisations. RÉSUMN DE L’ARTICLE
- Le leader systématique : ordonné et lié aux processus, il base son action sur la planification et l’utilisation efficace des outils existants. Il classe, ordonne et utilise la logique pour ses prises de décisions et actions.
- Le leader pragmatique : concret observateur, il tire son leadership de ses réussites liées à des prises de risque et à l’innovation. Adepte du progrès et du mouvement, il procède par essais/erreurs et est apprécié, avant tout, pour ses résultats.
- Le leader mythique : agit comme un missionnaire avec une dimension symbolique. Il utilise la cohésion et le sentiment d’appartenance pour faire adhérer les autres et développe une culture d’entreprise forte et des valeurs communes. On peut penser aux grands « héros » américains, véritables mythes dans les entreprises qu’ils ont développées (Ray Crock chez Mc Donalds « un homme bon qui aimait les gens... » ou Disney chez Disney, ou encore Branson chez Virgin et bien sûr Steve Jobs chez Apple).
- Le leader relationnel : prête attention à l’autre et utilise l’affectif en cherchant consensus et entente. Il va vers les autres et cherche à concilier les points de vue. C’est dans le respect des autres qu’il trouve sa principale valeur. On pense tout de suite à Nelson Mandela ou à Gandhi.
Ce qui est intéressant dans cette approche c’est que chaque type de leader peut correspondre à une activité de base de la vie de l’entreprise. Le leader mythique se réalise dans l’évènement (on pense à la mise en scène de Branson chez Virgin ou aux présentations de Steve Jobs). Le leader systématique sera maître des activités de contrôle. Il faudra un leader pragmatique pour mettre en œuvre des projets (Xavier Niel chez Free incarne assez bien cette figure). Enfin, les activités liées au déroulement seront conduites par un leader relationnel qui permettra de faire travailler tout le monde en bonne harmonie.
2.2.2. Les modèles multifactoriels
Dans ces approches, l’accent est plus mis sur des « facteurs » ou « niveaux d’implication » permettant de qualifier le leader.
. Le modèle de Collins (« from good to great », 2001) :
Ce modèle est intéressant car il représente le leadership à travers différents « niveaux » (cinq au total).
- Au niveau 1, l’individu contribue à l’organisation.
- Au niveau 2, l’individu est devenu un véritable « équipier » qui facilite l’atteinte des objectifs par le groupe.
- Au niveau 3, le manager est compétent et efficace, car il atteint ses objectifs.
- Au niveau 4, le manager se transforme en leader car il catalyse l’engagement et la poursuite, voire le dépassement des objectifs.
- Au niveau 5, le leadership est total, il est totalement engagé dans l’intérêt de l’organisation.
Ce qui est intéressant avec cette typologie, c’est qu’on ne parle de leader qu’à partir du quatrième « niveau », ce qui laisse penser qu’on pourrait être un bon collaborateur mais pas suffisamment pour devenir un leader, c’est à dire transcender les objectifs et entraîner les autres. A ce titre, on pourrait dire que le niveau 3 est celui du manager efficace quand le niveau 4 représente celui du leader efficient.
. Les types d’influences selon Edgar Morin :
Une autre typologie intéressante est établie par Edgar Morin en 1996. En travaillant sur le pouvoir dans les organisations, il se demande comment un individu peut peser sur le comportement des autres. Les différentes manières d’exercer le pouvoir constituent donc ce qu’il appelle « l’influence sociale ». C’est cette influence qui permet d’atteindre les objectifs et de provoquer les changements dans les entreprises. Edgar Morin distingue quatre formes d’influence sociale :
- La normalisation qui permet la mise en place de normes pour réguler un groupe, ce qui suppose des interactions. Le leader viendra, ici, construire ou reconstruire un groupe à travers les échanges.
- La conformité qui entraînera les individus à adopter des attitudes conformes au groupe. Difficile de parler de leadership ici, on recherche plutôt des standards.
- L’obéissance constitue la forme la plus connue et génère un leadership de type autoritaire avec une légitimité, normalement, acquise. La dynamique de l’obéissance est dialectique pour Edgar Morin car elle fait intervenir différentes formes de relations à autrui. Selon E. Morin, cette approche met en confiance le leader mais déresponsabilise les autres.
- L’innovation est la quatrième forme d’influence mais elle ne s’exerce pas dans le respect des normes du groupe. Elle constitue une variance, voire une déviance (notion de « free-lance dans l’entreprise ou »électron libre« ). Le leader déviant peut aussi bien être rejeté qu’occuper une position originale, d’alternative. Il peut changer la tendance dans un groupe en période de crise. La figure du »franc-tireur« en entreprise est communément admise pour les missions à haut risque avec des leaders qui pilotent une »task force« , parfois en dehors de l’organigramme officiel. Cette figure a été admirablement mise en scène au cinéma par Bertrand Tavernier( 1996) dans le film, »Capitaine Conan« , qui présente l’histoire d’un groupe de francs-tireurs et de leur chef (Philippe Torreton) qui »œuvrent" après la fin de la première guerre mondiale.
. L’approche de Vroom-Jago :
Victor Vroom et Arthur Jago ont établi un modèle de leadership basé sur des styles liés aux rôles joués par les dirigeants dans les prises de décision. Ils postulent que le leader peut modifier son style, ce qui a parfois conduit les spécialistes à qualifier cette approche de contingente (voir partie 3). Si l’on se concentre sur les styles, on obtient une typologie en cinq styles (Vroom et Jago, 1973) :
- Le style autocratique, qui exclut toute participation des subordonnés à la décision.
- Le style autocratique « ouvert », où le leader décide seul mais peut demander quelques informations à ses collaborateurs.
- Le style consultatif, dans lequel le leader ne décidera qu’après consultation (mais il garde le monopole de la décision).
- Le style consultatif collectif, où le débat s’instaure et permet une décision, prise par le leader.
- Le style consensuel, où le groupe décide, le leader ne devenant qu’un coordinateur.
. La matrice de Tannembaum et Schmidt (1958,1973) :
Assez proche du modèle précédent, la matrice de Tannembaum et Schmidt présente sept styles de leadership en fonction de deux facteurs qui varient ensemble : la liberté donnée au collaborateur et l’autorité du supérieur.
Source : http://www3.ac-clermont.fr/stg/IMG/pdf/3_doc_demo_celeades.pdf
Cette théorie a aussi été appelée théorie du continuum parce que les auteurs (Tannenbaum en 1958 et Schmidt en 1973) postulent que le style du leader peut varier en fonction du cas et des besoins du collaborateur. Le leader doit donc adopter une vision à long terme pour prendre en compte tous les facteurs de son secteur et de son entreprise afin de caler au mieux son style. Il peut être pertinent de représenter le manager par deux à trois « positions » sur la matrice suivant les cas et le type de collaborateurs. Ce modèle peut être préconisé à des étudiants qui doivent représenter le type de management de leur tuteur, dans des dossiers professionnels. Ainsi, on peut retrouver l’approche assez « simpliste » des « X » et « Y » de Mac Gregor (collaborateurs peu motivés et à « encadrer » versus collaborateurs motivés intrinsèquement, qu’il faut valoriser) qui préconise un leadership « différentiel » suivant les besoins des collaborateurs. Au-delà de ces approches qui cherchent à classer le leader par rapport aux autres et souvent en relation avec son action vis à vis des subordonnés, on trouve d’autres approches, plus actuelles qui cherchent à qualifier le leader soit en fonction des effets de ses actions sur les autres, soit en fonction de sa capacité de s’adapter à l’environnement.
3. Le leader, des approches actuelles divergentes
Les approches actuelles du leadership provoquent de nombreux débats. Il s’agit de savoir si l’on considère le leader comme vecteur de changement où si on le voit plutôt comme quelqu’un capable de comprendre son environnement et de rendre son action efficace par une analyse intelligente de la situation.
3.1 Les théories du leader charismatique et transformationnel : quand le leader influence les autres par son action
3.1.1. Le leadership peut-il s’expliquer par le charisme ?
Dans les sociétés occidentales et dans le modèle capitaliste, on associe souvent la réussite d’une organisation aux qualités de son dirigeant. Certaines cultures d’entreprises mettent en avant des « héros » souvent caractérisés par leur charisme. Max Weber a cherché à l’étudier en définissant le charisme comme : « la qualité extraordinaire d’un personnage, doué de forces ou de caractères surnaturels ou surhumains, inaccessibles au commun des mortels. Ces pouvoirs ou qualités d’origine divine ou magique établissent le leadership de la personne concernée. » (Max Weber, 1947, in « the theory of social and economic organization »). L’aspect surnaturel de cette approche transparait souvent dans les propos de présentation de certains PDG par leurs collaborateurs, empreints de crainte et de subordination. On a ainsi présenté Carlos Goshn comme « monsieur 77 » (en référence à son temps de travail) ou comme l’homme qui a fait la morale aux cadres dirigeants japonais (avant de les licencier au moment de la prise en main de Nissan). On rappelle aussi les paroles « magiques » de Martin Luther King ou les présentations lumineuses de Steve Jobs (à l’occasion de lancements de produits). Les grands discours de certains hommes politiques semblaient frappés de cette marque charismatique (Kennedy, de Gaulle, Mitterrand...). L’analyse du charisme s’attache plus à l’effet porté aux subordonnés qu’à l’explication même des fondements du charisme (difficile de comparer Gandhi et Carlos Goshn, mais on peut leur attribuer du charisme quant à l’effet provoqué par leurs discours). D’après certains chercheurs, ce sont les subordonnés qui façonneraient cette dimension quasi-magique du leader charismatique (Conger, 1988, in « behavioral dimensions of charismatic leadership »). Les compétences reconnues sont alors extraordinaires, voire héroïques (« l’homme qui a redressé l’entreprise X »). Cinq grandes caractéristiques sont retenues par Conger pour décrire ce type de leader :
- Il possède une vision, qu’il est capable de présenter (on pense à Steve Jobs ou Bill Gates ou le fameux « Yes, we can » d’Obama).
- Il prend des risques, financiers et personnels (Richard Branson, par exemple ou le PDG de Free, Xavier Niel).
- Il possède une sensibilité environnementale, il sait analyser les contraintes et saisir les opportunités (en y affectant les ressources nécessaires). Il a donc une vision stratégique et à long terme.
- Il est sensible aux besoins des subordonnés, il possède donc des qualités de perception. Tous les grands « porte-parole » possèdent cette aptitude qui les distingue (les discours de Martin Luther King sont un modèle sur ce thème).
- Son comportement est non conformiste, et même parfois risqué. On peut penser à l’extraordinaire capacité de résistance de Nelson Mandela lorsqu’il était opposant mais aussi à son comportement lors de sa présidence (sur ce thème, revoir le film de Clint Eastwood « Invictus »).
Les chercheurs ont également tenté d’expliquer l’efficacité de ce modèle mais aussi ses risques. Le leader charismatique trouve son espace d’évolution idéal en cas de crise ou de grande incertitude. Les grands leaders politiques charismatiques ont « explosé » à l’occasion de grands bouleversements politiques et sociaux. On peut prendre exemple sur l’ascension de Lech Walesa, le leader de la grande grève polonaise de la fin des années 70, de Martin Luther King, leader pacifiste des afro-américains dans les années 60. L’appel du 18 Juin, du général de Gaulle illustre encore cette importance de l’incertitude. On peut aussi penser à Mao, ou Fidel Castro dans un autre registre. Franklin Roosevelt émerge dans un contexte de grande crise, avec une vision nouvelle pour l’Amérique. Apple rappelle Steve Jobs en 1997, pour sauver l’entreprise. Ce qui est intéressant, c’est qu’on peut prendre en exemple de grandes personnalités mais que l’analyse s’applique également à des « inconnus », simples leaders d’une grève qui se durcit ou à l’occasion d’un accident collectif (un « héros charismatique » peut émerger). Certains « inconnus » au départ sont devenus à la fois les hérauts et les héros d’un mouvement, brusquement mis en lumière (Daniel Cohn-Bendit en mai 68, par exemple). Cependant, cette approche porte en elle ses propres contraintes et donc une sorte de « côté obscur » du leader charismatique. La surenchère autour de cette forme de leaders a conduit certaines entreprises à les placer sur un piédestal en versant des sommes colossales. Le résultat a conduit à une « perversion » du modèle vers un type de leader égocentrique et vaniteux, porté avant tout par son intérêt personnel. Certains historiens marquent ainsi la différence entre Bonaparte et Napoléon (à partir du couronnement ?) et relèvent un nombre impressionnant de personnalités politiques charismatiques devenues des dictateurs (Fidel Castro, Staline, Mao...). Tous ont en commun les caractéristiques présentées plus haut mais ils n’ont pas su rester « au service de la collectivité ». Une étude de 2001 sur 29 entreprises performantes sur le long terme a relevé qu’aucune n’était dirigée par un leader égocentrique (Collins, 2001). Une autre forme de leadership émerge alors en cas de bons résultats, avec des qualités d’humilité (tout en restant volontaires). Ils sont souvent dans l’ombre de leur entreprise, tout en restant efficaces. Collins les a taxés de « leader de niveau 5 » (voir, 2.2.1. Typologie de Collins). Bien sûr, on pense à Nelson Mandela ou à Gandhi mais du côté des entreprises, Amancio Ortega, fondateur de Zara, représente bien ce modèle (ainsi que les frères Albrecht, propriétaires d’Aldi). Ils « tiennent le cap » comme au premier jour, sans faste et en restant humble. Ce peut être aussi un modèle dans un grand groupe. Chez les Mulliez, dans le groupe Auchan, on rappelle souvent cette nécessité d’humilité qui représente les valeurs de la famille (le groupe d’ailleurs, appartient toujours en grande partie à la famille et aux salariés). On a ainsi vu que cette dimension peut s’étendre bien au-delà du monde du travail (politique, sport, mais aussi... secte). Cependant, ce modèle ne permet pas de donner une réponse globale aux problématiques du leadership, car son émergence est liée à un certain contexte. Quid du leadership en période « normale » ? De plus, l’aspect binaire de ce modèle avec les risques de dérive (on peut penser à l’émergence de gourous dans les sectes, tous leaders charismatiques), le rend peu opérationnel et risqué pour une organisation. Les chercheurs ont donc travaillé sur un modèle plus abouti, permettant de s’appliquer dans toutes les situations : le leadership transformationnel.
3.1.2. Le leadership transformationnel, une version aboutie du modèle de l’influence
Dans les années 80, plusieurs chercheurs ont mis en avant deux modèles de leadership qui diffèrent par leur efficacité et leur engagement : le leader transactionnel et le leader transformationnel. Le leader transactionnel oriente ses subordonnés en clarifiant les rôles et tâches pour qu’ils atteignent leur objectif alors que le leader transformationnel cherche à inciter ses subordonnées à transcender leurs intérêts personnels pour le bien de l’entreprise (Bass, 1985). Le modèle transformationnel est intéressant car il reprend les grands mythes constructeurs et rappelle l’engagement collectif, ce qui est pertinent en cas de crise ou d’incertitude. Bill Gates incarne bien ce modèle et on prend souvent comme exemple Michel-Edouard Leclerc, en France. Ce dernier justifie en permanence ses décisions par la nécessité collective (« au nom des adhérents de son groupe » ou « au nom des consommateurs »). Quatre grandes caractéristiques sont relevées par les chercheurs (Bass, 1990) :
- Une certaine forme de charisme, ce leader fournit une vision ;
- Une inspiration, il sait faire partager ses attentes et utilise des symboles ;
- Une stimulation intellectuelle, ce leader favorise la résolution collective des problèmes ;
- Une considération individuelle, il accorde de l’attention à tous.
Le leader transformationnel favorise l’innovation et la créativité, car il mobilise tout le monde, en période de crise, pour obtenir des réponses nouvelles aux problèmes (Jung, 2003). L’armée américaine a ainsi constaté, pendant la guerre du Golfe, que trop de conformisme et d’adhésion gênait l’action des officiers. Le colonel Wong travaille donc pour stimuler la créativité et la prise de risque (Bass, 2005). Il est question d’engagement collectif dans l’action de ce type de leader qui cherche à mobiliser les collaborateurs avec toutes leurs ressources. En cela, il devient un modèle plus efficace que le modèle transactionnel (voir figure ci-après)
Source : Comportements organisationnels, 2006, Robbins et Judge, Pearson Education
Persuadés que ce modèle de leadership est le plus efficace, de nombreux chercheurs ont tenté de démontrer sa supériorité et sa nécessité. Timothy Judge a compilé 87 études différentes pour montrer que ce type de leadership combinait performances élevées des leaders et motivation et satisfaction importantes des subordonnés (Judge, 2004). Ce qui est intéressant, c’est de constater que ces études portent sur de nombreux secteurs différents (armée, écoles, sport, entreprises, administrations...), ce qui tendrait à démontrer le caractère « universel » de ce type de leadership. Le rapprochement avec le modèle de leadership charismatique a été tenté par certains chercheurs (Bass, 1985 et House, 1994). Ils concluent que le charisme est une condition nécessaire mais pas suffisante au développement de ce modèle. Le leader charismatique n’ira pas aussi loin que le leader transformationnel qui va permettre à ses subordonnés de remettre en question les idées établies et même les conceptions du leader. On peut dire que le leader transformationnel prend des risques supplémentaires par rapport au leader charismatique qui impose ses idées. Le modèle transformationnel reste plus que jamais d’actualité en période d’incertitude car il postule que pour changer il faut déconstruire et que toutes les énergies doivent se mobiliser dans un but commun. Cependant ce modèle ne pose pas la question de la légitimité du but. De nombreux hommes politiques ont réussi à entraîner des foules en utilisant parfois des buts fictifs ou en les « détournant ». Pour utiliser un exemple extrême, certains scientifiques nazis étaient persuadés travailler « pour le bien de la science » en commettant des atrocités, certains médecins nazis n’avaient pas le sentiment d’aller contre le serment d’Hippocrate, lors de leurs « expérimentations ». C’est donc récemment qu’a émergé un nouveau modèle, plus « éthique », celui de leader authentique.
3.1.3. La nécessité d’un leadership authentique
Plusieurs chercheurs ont travaillé sur ce modèle au milieu des années 2000. Ils ont mis en avant la nécessité d’une approche éthique basée sur la confiance. Le leadership authentique serait donc la forme la plus aboutie du leadership (Avolio, 2004). Les leaders authentiques connaissent les valeurs auxquelles ils croient et ils les incarnent. Ils savent partager l’information (et non la retenir comme symbole de leur puissance) et laissent leurs subordonnés s’exprimer.
Mintzberg va plus loin quand il estime : « Le vrai leadership se mérite à l’interne, c’est-à-dire dans l’unité, dans l’organisation, dans la communauté, voire dans la nation. Ce leadership ne se contente pas de la direction d’une personne, il cherche d’abord la personne qui convient et la soutient par la suite avec enthousiasme » (Mintzberg, 2008).
De nombreux excès et abus, dans les années 2000, ont renforcé la nécessité d’une démarche éthique du leader. Les affaires (Enron, Parmalat, Servier...) ont plongé quelques grandes entreprises dans des procès qui ont pointé l’action condamnable de dirigeants. Même certains dirigeants charismatiques ont été « éclaboussés » par des affaires remettant en question leur déontologie et leur morale (Clinton, Mitterrand...). Fréquemment, le scandale des paquets de stock-options, versés aux dirigeants, resurgit.
Les chercheurs pointent donc, à la fois, la nécessité de la tenue des objectifs mais aussi les moyens employés pour les atteindre. Ce mode de leadership repose également sur la confiance attribuée par les subordonnés et elle s’appuie sur l’expérience vécue. Cinq dimensions de la confiance ont été mises en avant par les chercheurs (Schindler, 1993) :
- L’intégrité, qui fait référence à l’honnêteté perçue par les collaborateurs ;
- La compétence qui englobe les capacités et savoirs agir du leader ;
- La cohérence qui se rapporte au discernement du leader ;
- La loyauté qui exclut tout opportunisme du leader ;
- L’ouverture qui constitue la dernière dimension de la confiance car il s’agit de savoir si l’on peut espérer que l’autre dise toute la vérité.
Si la confiance peut parfois être accordée en craignant les représailles en cas de trahison, elle sera plus solide si elle repose sur la capacité à comprendre les intentions de l’autre. On parlera alors de « confiance d’identification » (Shapiro, 1992). Les affaires qui ont défrayé la chronique, dans le monde bancaire et boursier, ont mis l’accent sur la nécessité de la confiance et sur les ravages que pouvait entraîner la posture inverse de défiance. Les banques communiquent aujourd’hui sur cette valeur (« faites-nous confiance ! ») et de nombreuses recherches ont pointé le rôle destructeur de la défiance, à tous les niveaux. Une étude américaine de 2003 a démontré que seulement 43 % des employés américains avaient confiance en leur dirigeant ! (Gantz Willey research, 2003).
Après avoir vu le rôle que peut jouer le leader sur les personnes qu’il influence, on peut se demander si l’inversion de l’approche n’est pas possible, voire souhaitable. En effet, peu de leaders sont concernés par cette approche charismatique ou transformationnelle, quid des « leaders au quotidien » qui peuplent nos entreprises et organisations ? En partant de l’analyse et de la prise en compte de l’environnement, les approches contingentes proposent un modèle beaucoup plus « universel » et situationnel.
3.2 Les approches contingentes
Plusieurs approches existent mais elles ont toutes en commun la prise en compte des différents facteurs de contingence.
3.2.1. Le modèle de Fielder
C’est le premier modèle à s’être attaché aux variables situationnelles (Fielder, 1967). Selon lui, l’efficacité du travail d’un groupe dépend de l’adéquation entre le style du leader et le degré de contrôle conféré par la situation. Pour déterminer la nature du leadership, Fielder a mis au point un questionnaire (le questionnaire du collaborateur le moins apprécié, ou CMA), autour d’adjectifs opposés (« efficace/inefficace » par exemple). Les leaders sont les sujets du test. Fielder pense que les leaders sont incapables de changer de style, il établit donc trois facteurs situationnels qui forment des variables de contingence :
- Les relations personnelles entre le leader et les membres du groupe (de bonnes à mauvaises) ;
- La structuration des tâches (de forte à faible) ;
- Le pouvoir du leader (de fort à faible).
Si les trois facteurs sont au maximum, l’autorité du leader sera maximale. En combinant les différents cas de figure, on trouve huit situations différentes et on peut ainsi se déplacer sur un « curseur » (voir figure ci-après) en recherchant la correspondance entre le leader et la situation.
Source : Comportements organisationnels, 2006, Robbins et Judge, Pearson Education
En définitive, puisque Fielder postule que le leader ne peut changer, il n’existe que deux solutions possibles en cas de problème de management :
- Changer de leader pour une personne plus adaptée à la situation ;
- Adapter la situation au leader et à ses « orientations » (vers la tâche ou vers les relations humaines). Même si le modèle a été jugé crédible, il est difficile à mettre en place concrètement (les « deux » solutions ont des répercussions humaines importantes). Ce qui a amené à une évolution du modèle avec une théorie davantage basée sur l’intelligence et l’expérience du leader.
3.2.2. La théorie des ressources cognitives (Fielder et Garcia)
Cette théorie se développe dans les années 90 et met en avant l’intelligence expérientielle du leader en situation de stress et d’incertitude. La pression du stress « active » certaines ressources cognitives qui se substituent à la rationalité et à la logique. On peut prendre le cas de Bernard Tapie qui a toujours défendu le rôle joué par son expérience dans les prises de décision en situation difficile (fréquemment pour lui !). Cependant, cette théorie est difficile à mettre en place car les connexions neuronales expliquant cette réaction sont liées à chaque individu, on peut établir que le modèle existe mais il est complexe à « dupliquer ». Les chercheurs de la contingence se sont alors tournés vers un modèle plus facile à expliquer et à dupliquer lors de formations, il s’agit du modèle du leadership situationnel.
3.2.3. La théorie du leadership situationnel d’Hersey et Blanchard
Hersey et Blanchard ont le mérite d’avoir influencé des générations de formateurs et consultants qui ont surdéveloppé leur modèle. En effet, ce modèle est simple à expliquer car il postule que le leader va chercher à accroître progressivement la maturité de ses subordonnés afin de développer leur autonomie dans le travail. L’autonomie sera liée à la compétence et à la motivation du salarié. C’est donc une théorie de la contingence basée sur les subordonnés. En fonction de leur maturité, quatre modes de management se dégagent :
- Le mode directif qui s’applique en l’absence totale de maturité ;
- Le mode persuasif qui entraine les subordonnés peu matures ;
- Le mode participatif s’applique lorsque les relations sont très fortes et dans un contexte peu organisationnel (on pense à l’informatique Hi-Tech ou aux agences de communication) ;
- Le mode délégatif s’impose en cas de forte maturité des subordonnés.
Ces quatre modes supposent des postures différentes (épauler, entraîner, déléguer, diriger) de la part des leaders, on les retrouve dans la figure suivante :
Source : Management John R. Schermerhorn, Jr<*p>
Ce mode de leadership présente un caractère très intuitif et s’il a séduit de nombreux managers, il est complexe à mettre en place car il suppose de ne pas se tromper sur la qualification des subordonnés. De plus, aucune réelle méthodologie n’a été développée à ce jour. Une autre théorie, plus actuelle, se base sur le comportement différent du leader lorsqu’il s’adresse à des groupes différents.
3.2.4. La théorie de l’échange leader/membre
Tous les enseignants du monde ont vécu ce phénomène : on ne refait jamais la même chose et on ne s’adresse pas de la même manière à deux groupes différents. Les leaders qui appliquent ce principe vont différencier leur approche des différents groupes. Avec certains groupes, ils vont privilégier les relations hiérarchiques et avec d’autres groupes, utiliser des relations plus informelles. Cette théorie est très facile à observer en France où le management est marqué par l’appartenance à des réseaux. On peut supposer qu’un leader qui « a autorité » sur deux cadres issus de la même grande école que lui ne va pas communiquer de la même manière qu’avec des subordonnés situés à l’extérieur de ce groupe d’appartenance. Le leader constitue donc des cercles internes (image reprise d’ailleurs par Google avec son « Google + ») sur lesquels il peut s’appuyer. La haute fonction publique française utilise beaucoup ce mode de fonctionnement que l’on retrouve aussi au sommet des hiérarchies des grands groupes privés français. De nombreuses recherches ont mis en avant ce rôle joué par les subordonnés « adoubés » (Eden, 1992 qui revient sur l’effet Pygmalion). L’organisation des ministères français (et même de la présidence) nous en donne un bon exemple avec le rôle important joué par les « conseillers », en dehors de toute hiérarchie officielle. Ce modèle de la contingence est aujourd’hui celui qui a le plus d’influence parmi les experts et il a été consolidé à travers une théorie récente, celle de l’objectif-trajectoire de House.
3.2.5. Le modèle de l’objectif-trajectoire de House
A partir des années 70, House travaille sur le leader, figure de proue du management. Celui-ci créé la voix à suivre et facilite l’atteinte des objectifs de ses collaborateurs. Cette théorie, aussi appelée « théorie du path-goal » ; postule qu’un leader peut adopter quatre mode de leadership suivant la situation rencontrée :
- Leadership directif, avec fixation précise des règles à suivre pour les salariés peu impliqués ;
- Leadership de soutien, instaure une relation de proximité avec les collaborateurs en les soutenant pour les salariés « suiveurs » ;
- Leadership participatif, avec partage de l’information et prise en compte des subordonnés pour ceux qui veulent des défis ;
- Leadership orienté résultats, encourage la performance des collaborateurs pour ceux qui attendent des gratifications.
Dans cette théorie, on trouve deux sortes de facteurs de contingence :
- Les facteurs liés à l’environnement et à ses caractéristiques, ce qui suppose une analyse assez fine par le leader ;
- Les facteurs liés aux subordonnés, ce qui suppose une parfaite connaissance de ceux-ci par le leader.
Même si cette théorie est séduisante, elle suppose de nombreux ajustements et une analyse assez fine difficile à mener en situation d’urgence. Elle a parfois été remise en question (Villa, 2003).Dans les années 80, Vroom et Jago ont proposé un modèle plus complet et aussi plus opérationnel, tenant compte des variables de contingence.
3.2.6. Le modèle de Vroom-Jago
Après des travaux en 1973 sur les cinq styles du leader (voir plus haut), ils se sont concentrés sur le leader lui-même, pour aller plus loin et intégrer les variables contingentes. Il s’agit du modèle de la « participation du leader ». Celui-ci propose une série de règles permettant de déterminer la forme et l’ampleur de l’implication décisionnelle du leader en fonction de la situation.
Douze variables sont identifiées (voir schéma ci-après) :
Source : Comportements organisationnels, 2006, Robbins et Judge, Pearson <*p>
Ce modèle présente une complexité intéressante pour décrire précisément tous les facteurs à prendre en compte dans la mise en place du mode de leadership. Cependant, cette complexité le rend peu réaliste pour des praticiens et plutôt réservé aux chercheurs.
Une dernière évolution de ces modèles apparait récemment à travers la théorie du « complexity leadership ».
3.2.7. La théorie du complexity leadership, comme prise en compte d’un réseau de relations complexes
Une thèse très récente (May, 2011, « The power of a Lollipop Real, Good leadership in action », université Paris Dauphine) démontre que l’environnement pousse les entreprises à réagir face à la complexité du système. Cette réponse s’appuie sur des dirigeants capables de prendre en compte cette complexité en analysant les multiples interactions et en les modélisant. Trois rôles différents du leader émergent suivant le contexte :
- L’administrateur, qui évolue dans des structures complexes et qui va chercher avant tout à gérer les flux d’informations pour planifier l’action de chacun ;
- L’adaptateur, en situation de ressources restreintes ; qui va se focaliser sur la solution aux problèmes ;
- Le stimulateur, dans un contexte d’abondance de ressources, va favoriser l’innovation et l’émergence de nouvelles approches.
Conclusion
De la difficulté de mettre en avant un modèle unique, vers un modèle « mixte » ?
On a pu voir le paradoxe du leadership : tout le monde sait qu’il joue un rôle prépondérant dans les entreprises mais personne n’est capable de justifier un modèle d’analyse, universel. Les approches par typologies sont plus faciles à présenter en formation et pratiques à vendre pour les consultants alors que les approches par la contingence apparaissent plus fines mais difficiles à modéliser. Certains auteurs ont parfois cherché à les associer, ce qui a le mérite de les synthétiser. Manfred Kets De Vries propose une typologie intéressante en huit « archétypes » qui ne sont que les fruits d’une réponse à l’environnement. Ce qui suppose d’accepter de changer de leader si l’environnement change (le passage de Louis Schweitzer à Carlos Goshn chez Renault a pu en constituer l’illustration).
A partir de questionnaires, il relève huit archétypes :
- Le stratège, qui aborde le leadership comme une partie d’échecs et présente une vue d’ensemble de l’environnement ; il apporte la vision en temps de crise.
- Le catalyseur, agit en situation de redressement d’entreprise car il est un vecteur du changement (l’exemple de Giuliani, maire de New York et de son action après l’attentat en constitue une bonne illustration).
- Le négociateur, qui aborde chaque situation comme un défi, en vendant sa solution. Il peut sembler impatient mais règle rapidement des situations urgentes.
- L’entrepreneur, considère le leadership comme une activité de construction, avec des fondements à poser. Il sait faire preuve de persévérance et ténacité.
- L’innovateur, qui est générateur d’idées créatrices et sait communiquer sur son enthousiasme. James Dyson, inventeur de l’aspirateur qui porte son nom, met au point de nombreux procédés, tâtonne et innove en permanence.
- L’organisateur, cherche l’efficacité et se trouve à l’aise dans un système classique à forte visibilité. Son calme et sa connaissance des procédures sont ses meilleurs atouts.
- L’entraîneur, cherche à développer les personnes, en écoutant et en inspirant confiance.
- Le communicateur, se met en scène en permanence et cherche à convaincre. Il a une forte présence et sait capter les autres. On a souvent pris Kennedy comme illustration de cet archétype, tant il savait convaincre.
Au total, cette cartographie nous montre que qualifier les leaders est important mais qu’il s’agit également d’analyser l’environnement pour ajuster sa réponse. L’avantage est donc donné aux leaders capables de s’adapter et à l’aise dans différents environnements. Cependant, on constate ici des différences culturelles importantes. L’approche américaine valorise la réussite dans des domaines différents, avec les mêmes qualités et le transfert des compétences (où l’on retrouve des acteurs, hommes politiques de premier plan !) ; alors que l’approche française met en avant l’expertise et la formation initiale. Ainsi, sur les dix « nominés » pour le prix 2013 du leadership du journal Challenges... neuf sont issus d’une grande école et un seul est autodidacte (le président de Repetto). On a aussi parfois la tentation de rechercher la réponse dans d’autres disciplines pour expliquer les échecs (psychiatrie) et la peur des lendemains remet au goût du jour des modèles basiques mais incapables de tout expliquer (le leader charismatique). Une bonne connaissance de l’ensemble des théories suffit à comprendre la complexité d’une telle notion et à réfléchir avant de chercher à plaquer des modèles « simples » sur des leaders dont la complexité illustre bien la nature humaine.
Bibliographie de base :
Articles de base :
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- Cristol, D. (2011), Qui nous dirige ? Pourquoi le font-ils ? Revue des sciences de gestion
- Cristol, D. (2011), Le talent de ceux qui nous dirigent, Revue internationale de psychosociologie et de gestion des comportements organisationnels, 2001/41
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- Pavy Gérard, « chapitre 1. Le leadership en situation » in Alain Desreumaux, Formes de l’agir stratégique, De Boeck supérieur, 2007
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- Tedongmo Teko Henri et Bapes Ba Bapes Yves, Influence sociale et leadership dans la direction des personnes, 2007
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Manuel téléchargeable en ligne :
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Quatre manuels de référence :
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- Hellriegel, Slocum et Woodman, Management des organisations, 2010, De Boeck
- Christol D., Laize C., Radu Lefèbvre M., Leadership et Management, Etre Leader, ça s’apprend, 2011, De boeck
- Kets De Vries M., La face cachée du leadership, 2006, Pearson Education
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