Introduction
Le marketing est poussé à mesurer la performance de ses actions par l’importance des actifs qu’il contribue à créer : valeur client et capital marque dans le cadre d’un management de la valeur qui s’impose au sein des organisations.
Malgré les récents élargissements du marketing holiste [1] et de ses différentes composantes qui impliquent la prise en compte de toutes les parties prenantes (stackeholders) et leurs relations, il faut garder en tête que les clients sont la source fondamentale du cash flow et qu’il convient donc de répondre prioritairement à leurs besoins. Pour cela et durant de nombreuses années, les responsables marketing n’ont pas eu à se soucier de la mesure des performances de leurs actions. Ils n’avaient d’ailleurs pas à le faire face à la nécessité et la priorité à répondre aux besoins de leurs clients. Et pourtant la mesure des performances engage la crédibilité et justifie les actions futures. Comme l’affirme Richard Quinn, vice-president de Quality At Sears : “You simply can’t manage anything you can’t measure” (Vous ne pouvez simplement pas gérer ce que vous ne pouvez mesurer).
Le marketing actuel est clairement orienté vers la performance et la mesure de ses actions.
Philip Kotler dans la 14e édition du marketing management présente les différents aspects d’un marketing clairement holiste et met en évidence une des nouvelles orientations de la fonction : la mesure de ses performances.
La mesure des performances du marketing n’est pas un thème nouveau comme le rappelle Pierre Volle. Cependant et pendant longtemps les mesures de performance du marketing ont été limitées à des notions quantitatives comme les ventes, puis les parts de marché. Les panels distributeurs notamment (NIELSEN, IRI) ayant considérablement amélioré la production de mesures en temps réel et avec une précision accrue, les gens de marketing disposent aujourd’hui d’indicateurs nombreux et adaptés à leurs besoins.
Cependant les mesures évoquées par Pierre Volle montrent une évolution des exigences attribuées aux indicateurs : les ventes augmentent-elles avec une pression publicitaire ponctuelle ou accrue ? Ainsi il est demandé aussi de prendre en compte les ressources mises en œuvre pour atteindre les objectifs, il faut désormais mesurer l’efficience des actions.
De nos jours, il est clairement demandé aux responsables marketing d’être capables de quantifier leur performance c’est à dire prouver l’efficacité et l’efficience de leur action. La performance signifie habituellement les résultats financiers des activités : ventes, profits, augmentation de la valeur pour les actionnaires. L’efficacité permet de mesurer les actions marketing qui ont permis à l’entreprise d’atteindre ses objectifs, l’efficience posant le ratio des résultats par rapport aux ressources.
Ces notions d’efficacité et d’efficience sont au cœur de la mesure des performances en marketing et les méthodes de mise en place de la mesure de la performance se heurtent parfois à des contraintes culturelles et organisationnelles fortes.
Déjà en 1998, Bonoma et Clark reconnaissaient qu’aucun autre concept de l’histoire récente du marketing n’avait fait la preuve d’une telle résistance à la conceptualisation, la définition ou l’application. Et Laurent Flores ne contredira pas ce point de vue, lui qui tente dans son ouvrage « Mesurer la performance du marketing digital » de mettre en place un référentiel commun de mesure de la performance dans le nouvel environnement du marketing digital.
Pour Clark (1999), l’intérêt du concept de performance marketing dans son origine, cristallisait la convergence de 4 tendances :
- Après une décennie de réduction des effectifs, les grandes entreprises avaient atteint le point de rendements décroissants qui avait conduit à un recentrage sur le marketing comme une source de profits futurs.
- Ensuite il y a eu une forte demande d’informations relatives au marketing qui a toujours été assez pauvrement relayée dans les états financiers.
- Troisièmement, les mesures des performance comme les tableaux de bord prédictifs dits balance scorecard, (Kaplan et Norton, 1992), ont attiré l’attention sur la question du choix des mesures qui devraient être incluses dans la mesure de la performance des entreprises mettant ainsi un certain focus sur les indicateurs autres que financiers pour chaque fonction dont le marketing, au travers de l’axe « client » notamment.
- Depuis, cette préoccupation de la mesure de la performance est devenue centrale pour les responsables et le Marketing Sciences Institutes a établi en 2002-2004, « l’évaluation de la productivité marketing et des mesures marketing » comme la plus grande priorité de ses thèmes de recherche.
Enfin et c’est un fait plus récent, le management de la valeur s’impose à la fois sur le plan théorique dans les sciences de gestion et sur le plan pratique dans la vie des dirigeants. Il irrigue les modes de fonctionnement des organisations en mettant au premier plan les efforts fournis pour optimiser les actions en vue de dégager un surplus de bénéfices non seulement financier et humain mais vis à vis des clients et des concurrents. D’ailleurs, Philip Kotler présente l’orientation financière du marketing comme celle des années 2000.
De fait, le marketing est engagé à plus d’un titre dans cette nouvelle approche de ses actions d’autant plus qu’il est au sein de l’organisation l’un des premiers contributeurs à la création des nombreuses facettes de cette valeur : actionnariale, client, et bien sur valeur de marque. Comment le marketing contribue-t-il à la création de cette valeur ? La mesure de celle-ci peut-elle seulement s’évaluer à court terme ?
Il est donc temps d’avoir une vision claire et précise des résultats des actions marketing et pas seulement à court terme ou de façon opérationnelle, action par action mais plutôt de manière globale et stratégique pour saisir tous les liens de causalité existants entre les différentes actions et leur contribution à la création du capital marque (brand equity) et la valeur perçue par les clients.
Quels sont les enjeux de la mesure de la performance du marketing ? En quoi se renforce-t-elle ? Est-il possible de déterminer une mesure pour toutes les organisations ? Quels sont les indicateurs actuels utilisables ?
1. Pourquoi la fonction marketing doit-elle faire la preuve de ses performances ?
Le département marketing peut-être perçu comme peu efficace : il est nécessaire de repenser les indicateurs de mesure de sa performance.
Tim Ambler et Flora Kokkinaki, spécialistes de la mesure de la performance marketing ont analysé dans une grande enquête de référence menée auprès de 531 cadres supérieurs du marketing en Grande Bretagne leur perception de la performance de leur service dans l’entreprise. Le verdict est sans appel : les autres départements de l’entreprise se considèrent deux fois plus efficaces que le marketing en termes de décisions stratégiques, de solutions créatives et de qualité de leur travail.
Cette perception n’est-elle pas liée à la mesure des actions au sein de cette fonction ? Une enquête qualitative et quantitative a permis de constater que les responsables marketing se déclarent moins satisfaits de l’évaluation de leur travail que leurs collègues financiers. Serait-ce parce que les indicateurs dominants restent de l’ordre du financier ?
Les responsables marketing sont d’abord insatisfaits des méthodes d’évaluation du marketing.
Pourtant le divorce n’est pas consommé entre les deux fonctions qui estiment la qualité de leur travail réciproque et estiment partager les mêmes préoccupations pour satisfaire les objectifs de stratégie générale.
Les améliorations souhaitées sont : plus d’informations sur les résultats des campagnes, des lancements et de promotions ; des informations plus régulières délivrées de façon plus rapide ; des prévisions et des modélisations, une meilleure information en provenance des clients. Les responsables financiers mettent en avant l’évaluation financière interne des résultats et les hommes de marketing, les éléments d’évaluation autres que financiers comme la satisfaction client.
Comment en est-on arrivé à cette situation de perte de contrôle de la mesure par le marketing ?
Selon Robert Shaw, s’il existe une insatisfaction à l’égard de la mesure de la performance du marketing c’est aussi qu’historiquement celle-ci a souvent été abandonnée entre les mains des financiers. La mesure de la performance a souvent jugée accessoire, secondaire dans l’action des marketeurs occupés à d’abord satisfaire le client.
Il n’en reste pas moins que l’évaluation de la performance marketing engage la crédibilité et la précision de l’efficacité de leurs actions mesurées parfois avec des indicateurs inadaptés : le marketing doit fixer des objectifs précis quant à ses actions, définir des critères adéquats pour en mesurer l’atteinte et améliorer la présentation des résultats obtenus.
Les dépenses marketing sont importantes et visibles, par contre, l’impact et le retour sur investissement doivent être démontrés.
Alain Ollivier rappelle l’évolution de la fonction marketing. Porte parole de la clientèle de l’entreprise « le véritable patron de l’entreprise c’est le client », la fonction marketing a mis au cœur de l’entreprise la satisfaction du client avec des investissements lourds pour mieux connaître, convaincre et fidéliser la clientèle :
- Etudes de marché
- Tests sur toutes les composantes de l’offre
- Innovation et développement de nouveaux produits
- Communication
- Mise en œuvre de programme de fidélisation des clients rentables
- Opérations de relations publiques
- …
Fortement consommateur de ressources, de 20 à 40 % du budget total des firmes, le département marketing a connu une grande aisance budgétaire avec peu de demande de justification de l’efficience de ses opérations.
L’ambivalence de l’action marketing réside dans l’évidence des dépenses qu’elle engage et dans le même temps les difficultés pour mesurer des retombées souvent immatérielles.
- Quel est l’impact d’une meilleure connaissance du marché sur les ventes ?
- Quelles sont les retombées d’une modification d’une caractéristique d’un produit sur les préférences de la clientèle ?
- Comment mesure-t-on des conséquences d’une campagne institutionnelle sur la demande ?
D’un point de vue historique, l’orientation marché a été souvent jugée bénéfique pour les entreprises et la mesure de la productivité des différentes actions menées n’a pas été nécessaire. Mais dès les années 90, les différentes fonctions de l’entreprise ont été sollicitées pour participer aux efforts de gain de productivité.
Pourquoi la fonction marketing ne serait pas elle aussi mise à contribution au même titre que la production, la logistique ?
La rentabilité immédiate visée par les entreprises au nom d’une meilleure gestion des ressources a impacté aussi la fonction, et ces nouvelles exigences ont entrainé le développement de systèmes de contrôle plus sophistiqués et une rigueur bienvenue. Des nouveaux indicateurs sont apparus au côté des items classiques de volume de vente, chiffre d’affaires et part de marché : notoriété, satisfaction et fidélisation ont enrichi le dialogue entre marketing et contrôle.
Du point de vue des équipes, des spécialistes du contrôle sont apparus au côté des classiques chefs de produits. Chez Procter et Gamble, des analystes marques sont des contrôleurs de gestion qui assistent chaque marque du groupe.
Ainsi les résultats de l’enquête menée par Tim Ambler et Flora Kokkinaki ont permis de montrer que les dépenses marketing étaient une des métriques suivies par 84 % des responsables marketing, en 3e position derrière la part de marché et la notoriété.
De façon naturelle, porté par un environnement économique rude mais aussi par de nouvelles exigences, le marketing a mis au cœur de son langage la notion de retour sur investissement et le ROMI (retour sur investissement marketing) est devenu le nouveau credo des responsables en interne et avec les partenaires extérieurs comme par exemple les agences de communication. Ainsi le budget marketing ne peut plus être géré de manière intuitive ou par dérive (ajustement à celui de l’année précédente) et est considéré comme un investissement dont la rentabilité doit être pilotée comme les autres fonctions de l’entreprise (fonction achats, systèmes d’information,…).
Satisfaire l’actionnaire ou le client ? Un dilemme contraignant qui impose de mesurer la rentabilité des actions marketing.
Parmi les changements majeurs que connaît le marketing à l’heure actuelle, au côté des nouveaux usages des nouveaux outils technologiques et de communication, s’impose la prise en compte de plus en plus prégnante des actionnaires qui favorise un « management par la valeur » relayé au sein de l’entreprise par le gestionnaire qui suit les budgets. Le responsable marketing va donc devoir concilier les exigences du marché, des clients et des actionnaires. C’est selon Alain Ollivier, dans cette voie, que le responsable marketing va devoir trouver son chemin.
L’actionnaire a deux préoccupations majeures : la valorisation boursière et la rentabilité des capitaux investis et il attend du dirigeant des résultats sur ces deux axes.
Alain Ollivier professeur à l’ESCP Europe, présente la nécessité qui s’est imposée pour les directions marketing sous la pression des actionnaires à mesurer leurs performances.
Pour lui, les managers doivent concilier les actions de développement de la valeur client sur le long terme, gage de rentabilité et de développement des affaires et les exigences de rentabilité à court terme des actionnaires à la recherche de rentabilité sinon immédiate du moins visible.
Cette opposition d’intérêt peut dans un premier temps, remettre en cause des projets coûteux comme les investissements réalisés dans des systèmes de GRC (Gestion de la Relation Client) et dont la rentabilité a été battue en brèche mais aussi remettre en question les projets innovants à venir.
Dans tous les cas, impossible dans ce cadre, d’envisager des actions dont le coût ne pourrait clairement pas être compensé par des bénéfices calculés sinon anticipés.
Le management de la valeur et la création de valeur façonnent une nouvelle vision des actions marketing qui y participent.
Le management de la valeur définit à la fois une norme européenne EN 12 973, reprise en 2000 en France par L’AFNOR et désigne une démarche de rationalisation de l’usage des ressources pour optimiser les choix de l’entreprise et favoriser l’innovation. L’utilisation de la notion de valeur permet de rassembler les efforts de toutes les fonctions dans l’objectif de contribuer à son développement. Ce type de management doit permettre à l’entreprise dans l’état d’esprit, d’opter à tous les niveaux, dans toutes les fonctions et pour tous les projets, pour la meilleure décision dans un contexte donné. Il met en exergue la notion d’objectifs et de critères de mesure.
La notion de valeur est polysémique. Annick Bourguignon (1998) distingue trois acceptions de la valeur : la valeur au sens de la mesure (en particulier dans les disciplines scientifiques que sont les mathématiques et la physique), la valeur au sens économique et la valeur au sens philosophique. La valeur totale d’une entreprise regroupant les différentes valeurs économique, financière, organisationnelle et sociale.
Nous ne traiterons ici que des valeurs actionnariales et client qui peuvent être évaluées par des indicateurs de mesure propres au marketing.
Si l’on se met du point de vue du destinataire, la valeur créée doit l’être pour une partie prenante. La valeur financière est donc créée par les dirigeants pour satisfaire les actionnaires. Il y a eu focalisation sur cette valeur financière par le développement important des fonds de pension au sein des entreprises. Ainsi les investisseurs étrangers représentent près de la moitié de la valeur boursière de la bourse de Paris (Hoarau et Teller, 2001). Le management de la valeur actionnariale peut être vu comme une soumission à la dictature de l’actionnaire (Lorino, 1998). Mais dans le même temps, certains reconnaissent que créer de la valeur pour les actionnaires revient à prendre en compte toutes les parties prenantes en satisfaisant toujours plus de clients avec de bons produits fabriqués par des salariés motivés et en achetant à des fournisseurs les plus intéressants. On parle d’ailleurs de valeur partenariale en substitut à la valeur actionnariale.
La valeur client est la valeur perçue par le client. Elle est bien sûr synonyme de qualité mais aussi de sa relativité du rapport qualité/coûts. Chaque client perçoit cette qualité de manière subjective au travers de toutes les dimensions de l’offre : produit, service, flexibilité, prix,… et de ses différents aspects : valeur d’usage, de signe ou valeur hédonique. On parle aussi d’autres types de valeurs comme la valeur concurrentielle de l’entreprise sur son environnement dans le but de créer un avantage compétitif (Hoarau et Teller, 2001). Pourquoi la création de valeur est-elle au cœur des préoccupations des dirigeants ? Car elle permet de créer les moyens de financer le développement de l’entreprise au profit des actionnaires et des autres parties prenantes. Dans leur étude sur la création de valeur organisationnelle, Laurent Cappelletti et Djamel Khoutra propose une valeur totale créée qui repose sur un tryptique économique, organisationnel et social ; avec des leviers stratégiques, financiers et de gouvernance. Pour les auteurs la réduction de coûts est un puissant levier de création de valeur.
Ainsi donc, le management de la valeur se propage dans toutes les fonctions de l’entreprise car il semble porter les conditions de la pérennité de l’entreprise en mettant au cœur de toutes les fonctions la recherche de la meilleure solution. Le marketing de par son importance participe à cet effort de nouveau mode de gestion et doit aussi contribuer à optimiser le ratio valeur marketing créé et des coûts engagés.
L’actionnaire un shareholder qui impose un management par la valeur : le marketing joue un rôle essentiel dans la création de la valeur boursière et son action est orientée dans ce sens.
Sur le plan de la valorisation boursière, le marketing joue un rôle essentiel.
Des enquêtes ont démontré l’importance des actifs immatériels dans l’évaluation des entreprises sur les marchés : ils représenteraient 75 % de la valeur des entreprises cotées.
Or le marketing est déterminant dans la création de cette valeur. Il détermine fortement la valeur des marques, la productivité potentielle de la base installée de la clientèle, la qualité de la présence de l’entreprise dans les canaux de distribution et de communication, la productivité de la recherche, de l’innovation et du développement.
De nouvelles mesures financières mettent en exergue la capacité d’une entreprise à mettre en œuvre des actions rentables dont certaines sont des du domaine du marketing. Par exemple la prise en compte de l’EVA (Economic Value Added) [2]. Cette nouvelle mesure incrémentale peut remettre en cause certains projets traditionnellement menés sans ce type de considération.
En effet, l’actionnaire ne voit dans les actions marketing seulement des investissements qui ont à ses yeux d’autres et multiples alternatives. Pour lui l’intérêt des actions marketing ne dépend que de leur capacité à créer une valeur économique c’est à dire créer une rentabilité supérieure au coût d’opportunité du capital investi. De ce fait le calcul de l’EVA mettra en avant des projets exacerbant leur rentabilité actuelle au risque de remettre en cause la pérennité de l’entreprise : opérations de downsizing (réduction des effectifs) et les conséquences en perte de capital humain comme de savoir faire).
Ainsi selon l’observatoire des marchés financiers, certaines décisions d’ordre marketing ont clairement un impact sur la valeur boursière des entreprises. Des travaux de recherche (Aaker et Jacobson, 1994, 2001) ont mis en évidence le lien positif entre la bonne qualité perçue des produits, la satisfaction, la fidélité, le capital client et les performances boursières.
C’est ainsi qu’en 2010, Nestlé a du gérer une crise liée à la dénonciation par Greenpeace de l’utilisation d’huile de palme par un fabricant complice de l’extermination des orangs-outangs en Indonésie. La réaction des internautes à ce scandale ternît la réputation et l’image de marque de Nestlé et selon les analystes fut la cause du décrochage en bourse qui s’ensuivit.
Ainsi certains arbitrages doivent être menés entre des projets qui ne porteront leurs fruits qu’à long terme, des projets à rentabilité immédiate mais aussi entre des projets d’ensemble coûteux où chaque action n’a de sens que reliée à d’autres (campagne de communication intégrée) et des actions isolées mais moins onéreuses. La résultante de cette forte corrélation entre actions marketing et valeur actionnariale est l’importance de cet indicateur pour les entreprises : ainsi l’étude de Tim Ambler met en évidence que si cette métrique n’est utilisée que par 52,5 % des entreprises (effet d’échantillon 65 % des entreprises sont des grandes entreprises), 83,8 % des entreprises la prennent en compte au niveau de la direction et 79 % des responsables estiment qu’elle est un indicateur de mesure adapté à la performance marketing ; et ce derrière le profit et les ventes.
La nécessité et la formalisation du contrôle marketing.
Dans le cadre d’un management par objectifs le contrôle marketing passe par les quatre étapes suivantes :
La simplicité apparente de ce processus masque une des difficultés majeures de celle-ci : la fixation d’objectifs. Le plus difficile pour les responsables marketing est de fixer des objectifs précis, significatifs et adaptés à leurs actions et surtout en amont des actions et non pas à posteriori, en utilisant les seuls indicateurs disponibles. Ainsi Laurent Florès analyse cet obstacle comme une des raisons de la difficulté à mettre en place une évaluation correcte des actions de marketing digital : mesurer la notoriété par le taux de clics est-il approprié quand on sait que le taux de clics est d’environ 0,5 % sur une campagne ?
2. Les systèmes de mesure de la performance sont-ils nécessairement imparfaits ?
Le système de contrôle reflète l’importance accordée au marketing.
L’étude de Tim Ambler met en évidence que les bases théoriques du contrôle de la performance marketing reposent sur l’importance des indicateurs de mesure pour les informations qu’ils contiennent mais aussi la représentation ou la perception de ce que la direction d’une entreprise considère comme important.
C’est donc la façon dont le contrôle est mis en place qui détermine la performance marketing. Ainsi la perception des actions marketing dépend en grande partie du modèle de contrôle adopté par l’entreprise et sa mise en œuvre.
Les contrôles basés sur le revenu mettent l’accent sur les résultats ultimes financiers. Les contrôles basés sur le comportement et l’analyse des différentes activités sont reliés aux résultats financiers.
La formalisation du contrôle passe par des mécanismes de management écrits, des plans marketing afin d’influer sur les comportements dans le sens des objectifs à atteindre.
Selon la théorie institutionnelle (Meyer et Rowan), la mesure de la performance reflète une vision subjective de l’entreprise.
L’action d’une organisation est largement influencée par les valeurs culturelles, l’histoire d’une entreprise, en particulier et son secteur industriel.
Dans ce cadre, les actions des organisations reflètent les forces et les traditions d’imitation même en présence de changements dans les contenus des emplois et dans la technologie.
Dans cette perspective institutionnelle, les pratiques de l’organisation sont légitimées par l’environnement : les organisations qui intègrent les pratiques et les procédures qui sont définies par la rationalisation des concepts dominants de travail et d’organisation dans la société sont celles qui font augmenter leur légitimité et leurs chances de survie indépendamment des pratiques acquises et des procédures.
Cette perspective fournit une vue essentiellement sociale du choix des métriques et de leur sélection. Le conditionnement fonctionnel est un important prédicateur du comportement exécutif.
Ainsi l’étude de Tim Ambler met clairement en évidence que ce sont les plus grandes entreprises, les entreprises de commerce de détail et de biens de consommation qui collectent plus fréquemment de nombreuses données de mesure.
D’un autre côté les cadres percevraient les liens qui relient les activités aux objectifs de leur service et sélectionneraient les seuls indicateurs permettant de contribuer à ces objectifs. Finalement la sélection du type de métrique employé pour obtenir un avantage compétitif et évaluer l’efficacité des activités marketing dépendrait en grande partie de la vision qu’à le manager du monde.
Tim Ambler complète encore cette approche en montrant, au travers des résultats d’une étude, que les croyances des cadres sont directement influencées par les croyances des autres membres de l’échelon supérieur plutôt que leur propre pensée ou leur expérience professionnelle.
Pour des raisons de désirabilité sociale et de question politique, l’ensemble des mesures de marketing sélectionnées par une société tend donc à refléter le rendement prévu plutôt de manière subjective par référence à ce que la direction souhaite ; ce qui peut, dans certains cas, être différent de l’objectif de performance qui lui, dans une approche puriste, devrait être objectif.
L’orientation marché des entreprises favorise plus fortement la production d’indicateurs que d’autres approches.
Comme le rappellent David Gotteland et Christophe Haon dans leur étude sur le lien entre orientation marché et performance des nouveaux produits (9), l’orientation marché a suscité un intérêt croissant depuis les premiers travaux de Kohli et Jaworski (1990) et de Narver et Slater (1990). Définie comme une orientation stratégique destinée à « créer les comportements nécessaires à une performance supérieure et continue » (Narver & Slater, 1990), elle réaffirme les notions de création de valeur et de mesure de celle-ci. L’orientation marché a été abordée de deux manières distinctes : l’approche comportementale et culturelle.
Selon l’approche comportementale, l’orientation marché désigne « la production par l’organisation d’informations sur les besoins actuels et futurs des clients, la diffusion de ces informations dans les différents départements de l’organisation, et la réaction de l’organisation à ces informations » (Kohli & Jaworski, 1990).
Il existe donc un contexte managérial favorable au développement des métriques pour piloter une telle orientation.
Selon l’approche culturelle, l’orientation marché désigne « la culture organisationnelle [...] qui induit les comportements nécessaires pour proposer une valeur supérieure aux clients » (Narver & Slater, 1990). Celle-ci se manifeste dans l’organisation à travers trois composantes comportementales : une composante dite « d’orientation vers les clients », définie comme « la compréhension suffisante des clients cibles afin d’être capable de leur offrir une valeur supérieure de manière continue » , une composante dite « d’orientation vers les concurrents », définie comme « la capacité et la volonté d’une organisation d’identifier, d’analyser et de répondre aux actions des concurrents » et une composante dite de « coordination inter fonctionnelle », qui désigne « l’utilisation coordonnée des ressources de l’entreprise afin de proposer une valeur supérieure aux clients cibles » . Homburg et Pflesser (2000) ont mis en évidence que la culture d’orientation marché est antécédente aux comportements relevant de l’orientation marché selon Kohli et Jaworski (1990). On peut donc parler de culture organisationnelle qui produit des comportements pour proposer une valeur supérieure au client.
Il semble que l’orientation marché ait des effets positifs sur la performance d’une entreprise par la congruence que cette orientation génère vis à vis du marché et qui lui permet de faire des propositions à forte valeur ou du moins qui répondent parfaitement aux besoins des consommateurs.
Une entreprise orientée marché sera plus performante sur les plans commercial et financier par une attitude réactive mais surtout proactive vis à vis des besoins des clients. Elle sera portée naturellement à rechercher des indicateurs pour chercher à connaître ses clients et à mesurer ses actions pour les satisfaire.
Des indicateurs de performance de plus en plus nombreux.
Pierre Volle qui retrace l’évolution des indicateurs de performance marketing évoque la sophistication de ceux-ci : tout d’abord très orientés vers la performance commerciale, les ventes furent pendant longtemps l’indicateur de référence. Puis dans les années 80, la part de marché devint un indicateur de prédiction populaire pour mesurer la liquidité et la profitabilité. Puis dans les années 1990, d’autres mesures non financières comme la satisfaction client, la fidélité et la valeur de marque ont suscité une large attention.
Clark, en 1999, dans son histoire des mesures de la performance marketing, a montré comment les mesures de la performance ont évolué dans trois directions : tout d’abord des mesures financières traditionnelles : profit, vente, cash flow ; elles se sont élargies à d’autres mesures non financières : part de marché, satisfaction, fidélité et valeur de marque. Les performances financières qui semblent appropriées pour mesurer le fonctionnement de l’entreprise ne permettent pas de mesurer de manière optimale la mesure de la performance marketing qui implique de donner un peu plus d’attention au client. Pierre Volle évoque d’ailleurs d’autres indicateurs comme l’attachement et la confiance issus de mesure de la relation client permise grâce aux outils de Gestion de la Relation Client.
Ensuite, l’évolution des mesures est passée de données de résultat à des données de contribution et enfin de mesures unidimensionnelle à multidimensionnelle. Les plus souvent utilisées sont : les ventes, la part de marché, la contribution au profit, l’intention d’achat.
Le développement de nouvelles mesures adaptées à de nouveaux enjeux et besoins a entrainé la démultiplication du nombre de métriques. Meyer en 1998 (4) affirmait que les entreprises étaient noyées sous les indicateurs qui pouvaient aller jusqu’à une centaine. Ambler et Kokkinaki recensèrent dans une étude des principaux journaux de marketing 19 mesures parmi lesquelles dominaient : les ventes, la part de marché, la contribution au profit et l’intention d’achat. Une des orientations des indicateurs de mesure était, en autre, de réduire leur nombre à environ 25.
Le tableau récapitulatif des indicateurs de mesure utilisés par les responsables interrogés dans le cadre de l’enquête de Tima Ambler et Flora Kokkinaki regroupe 54 métriques dans des catégories englobant les différents aspects de la performance marketing :
Catégories d’indicateurs | Nombre utilisés | exemples |
---|---|---|
Attitude consommateurs | 10 | Notoriété, force de marque, satisfaction, intention d’achat |
Comportement consommateurs | 12 | Fidélité, sensibilité au prix, nombre de nouveaux clients, nombre de conversions |
Indicateurs de vente | 10 | Coût par contact, part de linéaire, fréquence d’achat, taux de rupture |
Concurrents | 7 | Part de marché, pénétration, part de voix,... |
Innovation | 4 | Bénéfices des nouveaux produits, nombre de lancements,... |
Finance | 11 | Ventes, rotation des stocks, EVA, ROI,... |
Mesures financières ou non financières ?
Pour Tim Ambler et Kokkinaki qui menèrent leurs recherches, 67,3 % des mesures étaient financières et 32,7 % non financières.
Dans leur étude empirique Marcin Pont et Robert Shaw recensent les indicateurs de mesure utilisés par les chercheurs au cours des études menées sur le thème de la performance marketing. Celles-ci sont significatives de la réalité de la mesure de la performance et mettent en évidence la prédominance des mesures financières.
Les mesures qui étaient fortement orientées vers la performance financière : profit, retour sur investissement et rendement de l’actif, semblent de moins en moins appropriées pour aborder les problèmes auxquels sont confrontées les entreprises à l’heure actuelle.
Une évolution majeure des années 1990 a été l’évolution de la mesure étroite du succès des produits à l’utilisation de mesures complémentaires orientées vers la valeur client (Clark 2001).
Les données disponibles en 2002 suggéraient que 40 à 60 % des entreprises avaient restructuré leur système de mesure de la performance.
Malgré cela, dans de nombreuses entreprises, la vision prédominante reste le résultat financier et les mesures financières un outil de gestion fondamental. Ce type de comportement pousse le management à engager des actions qui s’orientent sur une durée annuelle ou à court terme au détriment de l’investissement à long terme.
Les mesures financières ont l’avantage selon Luft et Shields (2002), de faire participer plus étroitement les individus à la réflexion sur le lien avec les mesures financières et en augmentent de ce fait la précision.
Dans le même temps il a été constaté que les mesures non financières pouvaient améliorer les niveaux de performance en fournissant une évaluation plus précise de leurs actions moins sensibles aux effets externes que les mesures financières.
Mesures subjectives ou objectives de la performance ?
Deux types de repères sont utilisés pour l’atteinte de la performance :
- Les repères internes (plan marketing) qui évaluent comment sont atteints les orientations de la direction et les objectifs. On parle aussi de mesures subjectives.
- Les repères externes (concurrence, marché) qui fournissent une perspective plus neutre qui prend en compte des facteurs liés à l’environnement et au marché. On utilise aussi le terme de mesures objectives.
Dans leur critique de la littérature empirique de la performance, Marcin Pont et Robin Shaw montrent comment les mesures subjectives de la performance s’imposent aux mesures objectives.
Ces premières sont relatives aux comparaisons des entreprises de leurs résultats par rapport à leurs propres prévisions ou à la concurrence. Ainsi les ventes et le profit sont utilisés par 91 % des firmes responsables interrogés par Tim Ambler et sont considérés comme des mesures adaptées à l’évaluation de la performance pour 80 % et 71 % d’entre eux. Les mesures de performance objectives sont plutôt en apparence considérées comme absolues et vérifiables par un tiers mais difficiles à obtenir pour des raisons de confidentialité ou de sensibilité. De plus, elles ne reflètent pas l’état de santé financière de l’entreprise. Les mesures subjectives ont souvent été préférées car elles permettaient de refléter la connaissance des entreprises et de leurs secteurs par les gestionnaires et d’effectuer des comparaisons entre pays.
La limite de ces indicateurs internes et subjectifs reste les points de référence qui ne sont pas contrôlables et qui provoquent des problèmes de multiplication des indicateurs ad’hoc crées pour répondre à aux besoins spécifiques à des entreprises et de leurs secteurs.
3. Quelles méthodes de mesure de la performance adopter ?
Quels sont les différents indicateurs pertinents pour mesurer la performance marketing ? Une approche opérationnelle ou globale ?
La dernière édition du Marketing management présente les indicateurs regroupés autour de 5 catégories : ventes, propension à acheter des clients, indicateurs clients, indicateurs de distribution et indicateurs de communication.
Les indicateurs présentés mettent en valeur l’impact autour du client par une approche plutôt opérationnelle de la performance des actions menées vis à vis de la clientèle et sur les axes de la distribution et de la communication avec les impacts plus globaux sur les ventes et les attitudes consommateurs résultants des actions marketing.
Tim Ambler et Flora Kokkinaki avaient pour leur part dans leur étude sur la mesure de la performance abouti eux aussi à 5 catégories de mesures dans les domaines suivants : finance, concurrence, comportement du consommateur, attitude du consommateur et comportement du client. Ces indicateurs étaient établis à l’aide de 3 critères adaptés à la mesure de la performance : la comparaison avec les objectifs internes (plan marketing), le marché (externe) et la possibilité d’un ajustement pour s’adapter à un changement dans l’évaluation du capital marque. En comparant les indicateurs pris en compte et dont l’importance est mesurée, les auteurs de l’étude dénombrent 19 indicateurs de référence pour l’ensemble des catégories :
Catégories | variable |
---|---|
Attitude consommateur | Notoriété, qualité perçue, satisfaction consommateur, intention d’achat, différenciation perçue, connaissance produit/marque |
Comportement consommateur | Nombre de nouveaux consommateurs, fidélité, conversion Analyse client satisfaction client, nombre de réclamations clients |
Concurrence | satisfaction relative des consommateurs, qualité perçue |
Innovation | nombre de nouveaux produits, ventes des nouveaux produits, marge des nouveaux produits |
Finance | ventes, marge commerciale, profit |
Les difficultés de la mesure de la performance marketing.
Il existe certaines difficultés à la mesure précise de l’action marketing.
Tout d’abord, Il semble souvent difficile de relier les actions marketing aux effets à long terme que celles-ci ont provoqués. En effet, la littérature sur la performance marketing a souvent été critiquée car elle mettait d’abord en avant les effets à court terme des actions. De plus, les études ont souvent fait émerger un nombre d’indicateurs très et trop élevé. Enfin des difficultés sont apparues à réaliser des comparaisons du fait de l’utilisation d’indicateurs différents à chaque mesure.
Ensuite, comment isoler les activités marketing spécifiques des autres activités souvent liées (commerciales, recherche et développement,) ?
Selon Tim Ambler et Flora Kokkinaki, la solution pourrait être la notion de brand equity ou valeur de marque ou capital marque qui peut aider à résoudre la problématique de mesure des effets à long terme et de l’analyse spécifique des actions marketing.
L’intérêt est de mesurer dans une approche holistique l’effet global du marketing.
La brand equity ou capital marque : la réconciliation du court et du long terme.
La brand equity appelée aussi « réputation », « puissance de marque », capital marque, santé de la marque est essentielle pour mesurer les résultats marketing.
La Brand Equity (Aaker 1991) est un terme largement utilisé pour désigner les actifs immatériels.
Srivastava and Shocker (1991) définissent la brand equity comme un ensemble d’associations et de comportements de la part des consommateurs de la marque des membres du circuit et de la société mère, qui permet à la marque de gagner de plus grands volumes et de meilleures marges qu’elle ne l’aurait fait sans la marque et qui donne un avantage fort durable et différencié.
Le capital marque est évalué à partir de mesures non financières à partir de mesures d’attitudes et de comportements de la clientèle.
Aaker présente la valeur de la marque comme un ensemble d’éléments favorables ou non à la création de valeur autour de cinq critères. Cette perception de la marque du point de vue consommateur met l’accent sur la construction et la mesure de critères déterminants à sa construction et sur la création de valeur pour le consommateur et l’entreprise.
L’évaluation d’une marque qui est loin de faire consensus met l’accent sur l’importance du surplus de bénéfice qui serait du à la seule reconnaissance de celle-ci. Ainsi Keller en 1993 définit le capital marque par le différentiel de connaissance des consommateurs face aux actions marketing de la marque comparativement à ses concurrents.
Composée de la notoriété et de l’image de marque elle définit son pouvoir sur la clientèle.
L’évaluation de la marque dans une perspective financière peut être utilisée pour évaluer la marque au début et à la fin de chaque période afin de mesurer la différence et d’ajuster les performances à court terme. Cette perspective est appropriée pour des firmes ayant une orientation plutôt financière. En 1993, Simon et Sullivan ont tenté de séparer la valeur de la marque de la valeur des autres actifs de l’entreprise. De cette analyse, la brand equity est obtenue comme la différence entre la valeur du marché financier et la valeur de ses actifs matériels. L’avantage de cette mesure financière est son orientation vers le futur alors que les estimations via le comportement reflètent les activités marketing menées par le passé. Elle est basée sur la valeur future du niveau actuel du capital marque.
Enfin, la perspective utilitaire déduit la valeur du capital marque des choix des consommateurs. Toutes les études menées ont mis en évidence que le capital marque est l’utilité additionnelle non expliquée par des attributs mesurables. Lassar, Mittal and Sharma (1995) suggèrent que la brand equity est le résultat des perceptions des consommateurs plus que d’indicateurs objectifs. Une mesure de la valeur de la marque est dès lors reliée à des résultats financiers non pas à cause de sa valeur absolue mais par sa valeur relative aux concurrents.
Sur le plan comptable, aligner les périodes de saisies et de revenus nécessite leur ajustement pour l’établissement de l’actif marketing, c’est à dire les bénéfices créés par le marketing qui doivent encore parvenir au compte de pertes et profits au début et à la fin de la période étudiée ; cet effort permet donc de prendre en compte les effets à long terme des décisions prises à court terme.
Quelle est l’importance de la valeur de marque et de sa puissance ? Les actifs immatériels sont déterminants dans la performance des entreprises (Jacobson 1990). Une entreprise qui a construit des actifs immatériels conséquents peut espérer un flux continu de ventes et profits sans investissement supplémentaire au moins pendant un certain temps. Ces actifs immatériels fournissent en théorie un moyen de réconcilier la performance à court et long terme.
En conclusion Tim Ambler affirme que même s’il existe de très nombreux moyens de mesurer la brand equity, mesurer l’augmentation ou la baisse de cet actif immatériel est une partie cruciale de la mesure de la performance marketing. Sans cela, les résultats à court terme peuvent présenter une image biaisée.
Les niveaux de contrôle mis en place.
Dans une vision plus stratégique, le contrôle doit permettre de produire des mesures répondant aux besoins de chaque fonction pour mettre en évidence la performance des actions marketing au travers des axes de son plan de marchéage et de façon globale. Il convient de rappeler les différents niveaux de contrôle du marketing selon Kotler.
Dans le cadre de ce contrôle, un certain nombre d’indicateurs sont retenus et recensés sur les différents aspects de l’action marketing au travers de la mise en œuvre des moyens du mix (communication et distribution) mais aussi des impacts auprès des clients et des ventes, mesure ultime et concrète des actions.
On le voit que le plan marketing reste un repère incontournable pour les responsables marketing.
Le budget établi pour un plan marketing reste un point de référence permettant d’effectuer des comparaisons internes et externes.
Lors de l’enquête menée par Tim Ambler et Fiora Kokkinaki, les responsables marketing ont clairement affirmé le rôle déterminant de cet outil. Pour 56 % d’entre eux, la définition de ce plan représente l’essentiel des activités marketing. L’élaboration répond à de nouvelles exigences : les plans résultants d’adaptation d’une année sur l’autre avec quelques modifications à la marge qui ont laissé la place à des plans établis à la tâche : quelles sont les activités marketing pour atteindre quels objectifs ? Quels sont les budgets associés aux actions recensées ? Chaque année, les actions sont remises en question et les moyens réévalués.
La méthode du plan « contractuel » fait référence à un budget sur lequel s’engagent les parties prenantes en interne ou externe.
Enfin le budget marketing dit « page blanche » présente un budget calculé ou modélisé à partir de la valeur actualisée nette, c’est à dire comparer les profits futurs avec l’investissement de départ et ce, en ramenant la valeur des profits futurs à la date de valeur des investissements initiaux.
Les outils classiques de mesure et d’amélioration de la rentabilité : compte d’exploitation et audit marketing.
Un nombre croissant de responsables marketing est évalué sur leur capacité à dégager de la rentabilité plutôt que du chiffre d’affaires. Ils utilisent donc de plus en plus l’analyse financière qui leur permet de mettre en évidence la rentabilité de leurs investissements. L’analyse des dépenses engagées dans une action et la mesure de la rentabilité de celle-ci permettent au responsable d’établir des comptes de résultat ou d’exploitation mesurant la rentabilité, permettant d’évaluer les écarts et d’envisager des mesures correctrices.
Au sein d ‘environnements turbulents, les entreprises sont amenées à remettre leurs actions en question et ce, soit de manière régulière et systématique, soit ponctuellement, dès qu’un indicateur met en évidence une contre performance.
Quant à l’audit marketing, c’est un examen complet, systématique, indépendant et régulier de l’environnement, des objectifs, stratégies et activités d’une entreprise, en vue de détecter les domaines qui posent problème et de recommander des actions correctives destinées à améliorer son efficacité marketing. L’audit marketing a une vision holiste de l’entreprise et de son environnement. Il permet de mettre en perspective l’entreprise au sein de son environnement et de faire en interne un bilan des méthodes engagées. Il questionne sur tous les moyens et procédures mis en place.
Une méthode de mesure de contrôle de la performance marketing.
Alain Ollivier propose une méthode permettant de mesurer la performance marketing au travers de 8 index qui mesurent le niveau d’indicateurs stratégiques.
- Pour le repère 1 : la mesure évalue quelle est la valeur attribuée à l’offre par le client ciblé. Il est la synthèse des bénéfices et des coûts associés à l’offre.
- Le repère 2 mesure de manière classique la notoriété et l’image.
- Le repère 3 mesure la qualité des canaux de contact : vente et communication.
- Le repère 4 - 5 évalue la qualité de la clientèle acquise.
- Le repère 6 -7 mesure, avec des indicateurs classiques, la démarche marketing : chiffre d’affaires, part de marché, marge contributive.
- Le repère 8 introduit le management de la valeur au sein de la fonction marketing. Il permet d’analyser la rentabilité globale des couples produits/marchés gérés par le marketing. Celle-ci doit dépasser les ressources financières qui lui sont affectées et permettra sur un plan stratégique de réaliser des choix au niveau de l’offre et des actions qui y sont reliées.
L’intérêt de cette méthode est de regrouper différents types d’indicateurs : financier, client dans leurs attitudes et comportements.
Les systèmes intégrés, automatisés et collaboratifs de pilotage du marketing : Marketing Resource Management.
Dans une démarche de rationalisation de leurs actions, les responsables marketing ont eux aussi bénéficié de systèmes de gestion intégrés leur permettant de piloter leurs actions.
Ainsi des systèmes de Marketing Resource Management (MRM), Enterprise Marketing Management (EMM) et Marketing Automation System (MAS) ont vu le jour. Ces progiciels de gestion intégrés permettent de gérer les projets et campagnes de communication mais aussi le management de la relation client et le capital marque.
Reliés aux autres systèmes de gestion de l’entreprise, ils sont positionnés en amont d’un système ERP (Enterprise ressource Planning) car situés sur un niveau plus stratégique de définition des objectifs et de prévisions des dépenses mais aussi d’un CRM (Customer Relationship Management). Leur utilisation est orientée vers le travail en groupe de projet sur un axe collaboratif mais aussi la veille concurrentielle et la planification.
Les systèmes de MRM sont à la fois des outils permettant d’optimiser la mesure de la performance et le contrôle des résultats et une voie dans la réduction des coûts et l’optimisation des actions réalisées.
Ainsi Bouygues Telecom en s’équipant d’un système de MRM de la société spécialisée Aprimo a réalisé des économies substantielles par un travail collaboratif pour une campagne d’e-mailing et des modifications de catalogue. La plupart du temps, l’optimisation du processus de communication permet d’économiser du temps, d’augmenter la réactivité et la création de valeur au sein des équipes marketing, en d’autres termes de faire progresser la productivité des équipes.
Bibliographie
Ouvrages de référence
Marketing management - Philip Kotler - 14e édition. Pearson
Mesurer l’efficacité du marketing digital- Laurent Flores 2012. Dunod
Marketing 3.0 Philipe Kotler - 2012. De boeck.
Articles de référence
La mesure des performance marketing : Assessing market performance the current state of metrics. London Business School Tim Ambler, Flora kokkinaki, Stefano Puntoni, Debra Riley. http://www.london.edu/facultyandresearch/research/docs/01-903.pdf
Measuring marketing performance : a critique of empirical literature. Marcin pont et robert shaw Deakin. http://dro.deakin.edu.au/view/DU:30005196
Comment évaluer le marketing ? Les échos.fr. http://www.lesechos.fr/formations/marketing/articles/article_1_9.htm
Comment concilier en marketing la logique managériale et le contrôle de l’actionnaire Alain Ollivier. http://www.marketing-trends-congress.com/content/comment-concilier-en-marketing-la-logique-manageriale-et-le-controle-de-l-actionnaire
La relation orientation marché et performance des nouveaux produits. Le rôle oublié de la diversité des équipes de développement. David GOTTELAND et Christophe HAON http://www.management-aims.com/PapersMgmt/135Gotteland.pdf
La mesure de la création de valeur organisationnelle. Laurent CAPPELLETTI http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/58/44/48/PDF/CAPPELLETTI.PDF
Le management de la valeur par l’association française de la valeur. http://www.afav.eu/index.php?option=com_content&task=view&id=27&Itemid=1
10 ans de débats autour du balancescorecard. http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/58/11/57/PDF/33.pdf
L’économétrie pour mesurer la performance des actions marketing et communication http://www.ekimetrics.com/fichiers/0_lettre010608.pdf
Sites internet
La web TV du management et du droit des entreprises : (http://www.tvdma.org/) http://www.tvdma.org/marketing-vente/marketing-vente-marketing/levolution-des-indicateurs-de-performance-marketing-pierre-volle : intervention Pierre Volle
Le café des doctorants : http://lecafedesdoctorants.wordpress.com/
Études de cas société APRIMO : http://www.aprimo.com/Customers_.aspx?id=456
Site archives recherches ouvertes : http://hal.archives-ouvertes.fr/
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