Un exemple de Projet Classe-Entreprise FIGUE DE BARBARIE SARL au Lycée Dumont D’Urville – MAUREPAS
INTRODUCTION
L’objectif majeur de la section professionnelle est de professionnaliser les élèves afin que leurs compétences puissent répondre aux besoins de leurs futurs employeurs. Cette rupture pédagogique est généralement très abstraite pour les élèves, par conséquent, il me semble important de donner aux élèves les moyens de s’impliquer plus directement et de rendre leur apprentissage plus concret.
Ainsi, afin d’aider au mieux les jeunes à percevoir et intégrer la spécificité de leur formation, il paraît intéressant de « créer » une entreprise au sein de la classe, en vue d’illustrer plus concrètement les concepts fondamentaux imposés par le référentiel. Cela permettra à l’enseignant de s’appuyer sur cette entreprise virtuelle tout au long des 3 années, et d’y revenir aussi souvent que cela lui sera nécessaire. Il ne s’agit pas de remplacer le programme par cette activité mais de transmettre « autrement » les compétences et savoir-faire.
De plus, cette activité peut aider à conjuguer différents chapitres d’une matière voire plusieurs tout au long de l’année. En effet, de nombreuses transversalités peuvent être mises en place.
Cette entreprise nécessite la participation de tous les élèves mais aussi de l’enseignant, puisque chacun aura un emploi ou une fonction précise au sein de celle-ci. Il est très important en effet que toute la classe s’investisse et soit sensibilisée par le projet.
En outre, l’accent est aussi mis sur la découverte du fonctionnement de l’entreprise et des différents rouages de celle-ci : sa création, son organisation et sa gestion. Cela permet à l’élève d’avoir une vue d’ensemble du produit, et en particulier de sa conception à sa commercialisation. L’enseignant mettra en place à la fois des travaux individuels et des travaux de groupe. L’essentiel de la formation se situe également dans l’apprentissage de relations humaines valorisantes : créativité, sens des responsabilités, esprit d’initiative, respect des autres...
Cette expérience s’inscrit totalement dans la philosophie de la section professionnelle et développe toute une série de compétences répartie en 2 pôles : Administratif et financier.
Pour finir, ce projet vise donc à développer une pédagogie de l’intégration privilégiant les activités d’apprentissage.
Les pages suivantes sont une description d’une approche personnelle, chacune est donc libre de s’approprier ce beau projet. En effet, il s’agit davantage de pistes à exploiter que de consignes à mettre en place.
I) LA « CLASSE-ENTREPRISE »
A) Définition
Le projet "Classe-Entreprise est une partie intégrante du cours. Il s’agit d’une entreprise fictive que les jeunes devront créer, gérer et faire prospérer. Les élèves gèrent leur mini-entreprise pendant une partie de leur grille horaire.
Ceci permet une mise en pratique immédiate et réelle des compétences étudiées. Le projet sert donc de support pédagogique vivant et rapproche les élèves de la réalité socio-économique par la simulation.
Le professeur est une des personnes ressources dans cet apprentissage, il transmet les savoirs, savoir-faire et savoir-être en les appliquant à des situations très concrètes.
B) Objectifs
Les objectifs visés sont :
Au niveau des élèves :
- De découvrir l’entreprise et son fonctionnement à travers une expérience concrète de production d’un bien (ou d’un service).
- Aide à son orientation (ou confirmation)
- Connaissance de l’entreprise, techniques de travail
- D’appréhender une démarche de projet facilitant la prise d’initiatives et le goût d’entreprendre.
- Réussite d’un projet, prise de conscience de son potentiel
- Découvrir la créativité, l’esprit d’initiative, le goût d’entreprendre
- De développer certaines aptitudes et compétences : s’informer, analyser, organiser, décider, réaliser, travailler en équipe, contrôler, évaluer…
- Le sens des responsabilités, l’intégration à une équipe
- La communication
Au niveau des professeurs :
- Conscientiser les élèves aux réalités socio-économiques
- Offrir des perspectives de re-motivation aux jeunes
- Favoriser le travail en équipe
- Élargir le champ culturel des jeunes
II) LA CREATION
Tout d’abord, afin de donner une certaine continuité à notre projet et d’y faire adhérer le plus possible les élèves, il est nécessaire de bien leur souligner l’état d’avancement de la création d’entreprise. Un moyen supplémentaire de les motiver consiste à leur rappeler tout au long de la création les responsabilités qui leur sont attribuées. Tout cela peut s’obtenir en les faisant participer au maximum dans la prise de décision en leur donnant du travail individuel et/ou collectif.
A) Dimensions économiques
Le choix de l’activité
Il me semble important pour bien commencer la création d’une entreprise de choisir avec sa classe son activité. En effet, cela permet de sensibiliser les élèves autour de cet objectif et de les mettre en situation d’acteurs rapidement... L’outil le mieux adapté est le « brainstorming » car il permet à chacun de s’exprimer. Suite à cette étape, un débat doit être organisé et celui-ci doit permettre d’aboutir à un choix collectif. Le dernier recours peut être le vote à bulletin secret
Le nom de l’entreprise
Comme pour l’activité, le nom doit être choisi suite à un travail individuel puis collectif. A ce moment, le professeur peut, avec l’aide des élèves, préciser les différentes caractéristiques d’un « bon nom » : facile à mémoriser, évocateur, tendance...
Le secteur d’activité
Concernant le choix du secteur d’activité, il m’apparaît souhaitable de ne pas laisser les élèves choisir seuls, le professeur devra les guider. Il les orientera vers la production de biens et non de services, car ce choix rendrait plus abstraite la compréhension du fonctionnement de l’entreprise. La production d’un service limiterait certaines perspectives de travail, le service créé ne nécessitant pas l’importation de matières premières. Il est intéressant de proposer une orientation très fléchée aboutissant sur une sensibilisation de l’élève... Par exemple, les produits biologiques ou encore le commerce équitable.
Les produits vendus
L’étape suivante et certainement une des plus importantes est celle qui débouchera sur le choix des produits vendus sans oublier leur composition. Comme pour les étapes précédentes, un brainstorming s’impose. Ensuite, il est intéressant de répartir les élèves par groupe de 4. A l’issue de ce travail, un représentant de chaque groupe vient proposer à l’ensemble de la classe les produits choisis par son groupe. Cette proposition doit être argumentée. Une fois les produits sélectionnés, les élèves doivent identifier les matières premières nécessaires à leur fabrication.
B) Dimensions juridiques
Le statut juridique
Avant toute chose, il est indispensable que les élèves maitrisent les différentes formes juridiques et leurs intérêts. Cela peut se faire dans le cadre d’un travail dirigé en classe ou d’un exposé préparé à la maison par leur soin. Ensuite, en examinant les différentes catégories juridiques possibles pour les entreprises privées, le professeur leur fait choisir le statut juridique le mieux approprié pour le projet.
Le statut de la S.A.R.L, qui comporte de 2 à 50 salariés, convient particulièrement à la création d’une entreprise dans une classe qui est constituée d’environ 30 élèves.
Le contrat de travail
Avant d’intégrer un poste dans une entreprise, il faut y postuler. Le premier travail est la rédaction de la lettre de motivation et du curriculum vitae. Chaque élève, dans le cadre d’un travail dirigé en demi-classe, doit être sensibilisé à l’importance du fond et de la forme de ces deux documents. Un exemple peut leur être distribué. Ensuite, chacun s’isole et met en forme son document. L’étape suivante est l’entretien d’embauche. Chaque futur salarié devra se présenter à un entretien d’embauche. Le recrutement peut être « joué » par les professeurs ou par des personnes extérieures comme par exemple des retraités bénévoles membre d’une association locale.
Les délégués du personnel
Comme tous les salariés, les jeunes ont le droit d’être représentés par des délégués du personnel. Pour élire ces représentants, le moment opportun est l’élection des délégués de classe et de leur suppléant. Avant tout chose, il est bon de faire découvrir à chacun l’intérêt et le rôle de ces élus au sein d’une entreprise. En partant du rôle des délégués de classe, il est facile pour les élèves de réfléchir à la définition de la fonction de délégué du personnel. Ensuite, les élections peuvent se tenir et cela en respectant les différentes règles du suffrage universel étudiées auparavant par les jeunes.
Le règlement intérieur
Pour finir avec les dimensions juridiques, il faut déterminer les règles de vie de notre entreprise au travers d’un règlement intérieur. Celui-ci a pour but de fixer les conditions de travail (horaires, congés, tenue vestimentaire…), les règles relatives à la discipline, le droit de la défense des salariés… Encore une fois, le lien avec le milieu scolaire et en l’occurrence, le règlement intérieur du lycée, se fait naturellement. Cet écrit déjà rédigé peut servir de base à la rédaction des règles de vie de l’entreprise. Pour établir ce règlement, les élèves sont répartis par groupe puis choisissent un thème pour lequel ils souhaitent fixer les règles. Cette réflexion sur ce thème doit aboutir à la rédaction d’un paragraphe du futur règlement intérieur.
C) Dimensions commerciales
Le lieu
La détermination de la localisation de l’entreprise permet de sensibiliser les élèves aux logiques qui interviennent dans le choix d’implantation d’une entreprise et de proposer des activités liées à la région choisie pour implanter l’entreprise.
Il est préférable de choisir la région dans laquelle vivent les élèves, cela présente de nombreux avantages : La comparaison avec les concurrents locaux, l’intervention de partenaires locaux…
Le choix du lieu d’implantation permet d’apporter une perspective nouvelle et plus concrète sur l’entreprise.
Le logo
Afin d’identifier de manière unique et immédiate l’entreprise, il est intéressant de créer un logo. Il servira en l’occurrence à illustrer les différents documents de l’entreprise : courrier, devis, facture… Cette mission peut être faite en collaboration avec le professeur d’Arts Appliqués, ce qui forme une transversalité. Chaque élève propose un logo qui sera soumis au vote lors d’un concours organisé au sein du lycée. Le lauréat de ce concours sera donc retenu comme le logo officiel de la classe-entreprise.
L’étude de marché
Comme toute entreprise, avant de se « lancer », il est intéressant de pratiquer une étude de marché sur le prix, la quantité, le type de client… Après un briefing du professeur présentant les enjeux de celle-ci, les élèves doivent la penser puis la mettre en oeuvre sur le « terrain ». Cet endroit peut être, tout simplement, le lycée.
Les prix de vente
Suite à l’étude marché les élèves doivent fixer les prix de vente, mais, auparavant, il est indispensable de fixer le coût de revient. Pour cela, les élèves doivent se servir du travail effectué lors du choix des produits vendus pour identifier les différentes matières premières et surtout leur prix. Dans un souci de simplification, le coût de revient est calculé en additionnant les matières premières. En effet, la main d’oeuvre ainsi que la répartition des différentes charges fixes sont ignorées. A partir du coût de revient, les jeunes doivent mettre en place une stratégie commerciale (quantitative ou qualitative) permettant de définir le taux de marge par produit. Encore une fois, ce travail est effectué par groupe de 3 ou 4 élèves et aussi, doit être argumenté. Avec le taux de marge par produit, les différents prix de vente peuvent être définis facilement.
Le site internet
Afin de répondre aux exigences commerciales du marché, l’entreprise doit être présente sur le net. Ce rapprochement à la réalité permet d’augmenter la crédibilité du projet. Il faut donc créer un site internet présentant l’entreprise : Nom, Adresse, Activité, Produits… Cette publication doit être créée puis mise à jour par les jeunes… Pour ce faire, il faut nommer à tour de rôle 2 personnes responsables de la partie « communication ».
III) L’ORGANISATION
A) Organigramme
Une étape importante dans la construction de l’entreprise réside dans l’embauche de salariés et de différents responsables. Dans notre projet, Le proviseur-adjoint du lycée est le gérant, la gestionnaire, la responsable de la production, l’enseignant de communication, la responsable administrative, l’enseignant de comptabilité, le responsable financier... Ensuite, il est indispensable de schématiser les liens hiérarchiques. Pour ce faire, il faut présenter aux élèves un schéma simplifié du fonctionnement du personnel au sein d’une entreprise en leur demandant de l’adapter au fonctionnement de leur entreprise.
L’organigramme de la société :
B) Services actifs
La « classe-entreprise » est articulée sur deux salles composées de différents services :
- Le pôle « Administratif », dirigé par le directeur administratif (Professeur de Secrétariat), réparti en 4 services : Service « accueil », service « Secrétariat de direction », service « Ressources humaines » puis service « Secrétariat ».
- Le pôle « Financier », dirigé par le directeur financier (Professeur de Comptabilité), réparti en 4 services spécialisés ou non suivants les activités proposées. Par exemple, Il peut y avoir le service « gestion des clients », le service « gestion des fournisseurs » ou encore, le service « gestion des stocks ».
Cette « classe-entreprise » est mise en place lorsque les élèves sont en demi-classe. Chaque service est composé au minimum et au maximum de 4. Cela entraine une répartition des tâches et des compétences dans les espaces spécifiques.
C) Descriptif d’une séance
Lorsque les élèves entrent en cours, ils sont considérés comme des salariés et le professeur, comme un directeur. Chaque salarié (élève) porte un badge avec son nom et sa fonction. Les salariés appartiennent à un servie et ce, pendant 2 voire 3 semaines. Chaque service est composé de 2 voire 3 salariés et d’un responsable. Celui-ci est nommé par le directeur et reste en fonction jusqu’au « turn-over » des services. Chaque salarié est responsable au moins 1 fois dans l’année.
En début de séance, les salariés prennent leur fonction pendant que le professeur effectue un briefing sur les objectifs attendus avec les 3 responsables. Ces consignes durent environ 15 minutes. Ensuite, chaque responsable rejoint son service afin d’annoncer les travaux à effectuer, les difficultés futures, le temps imparti… Cela dure entre 5 à 10 minutes.
Une fois la période introductrice réalisée, chacun se « penche » sur les tâches à effectuer. Beaucoup de travaux sont envoyés par le professeur directement dans la boîte de courriers électroniques des salariés. La communication est omniprésente mais elle doit respecter un certain cadre : chaque salarié peut aller se renseigner dans un autre service à condition de passer par le responsable du service concerné. En cas de problèmes, seul le responsable peut venir demander des explications au directeur, à lui ensuite de restituer l’information correctement. Les salariés doivent privilégier la communication par courriel (traçabilité), cette communication peut être au sein du service, avec un autre servie ou avec le directeur.
Lorsqu’un salarié a terminé son travail, il doit le communiquer par courriel à son responsable. Ce dernier doit vérifier le travail et le transmettre au directeur. A ce moment, le directeur doit valider ou non le travail réalisé. Dans le cas où la tâche n’a pas été correctement effectuée, le directeur transmet l’information au responsable qui doit prévenir le salarié.
En fin de séance soit 20 minutes avant la fin, chaque service se réunit pour effectuer un débriefing (difficultés-solutions). Une fois cela réalisé, le directeur prend 5 minutes avec les responsables afin qu’ils puissent lui transmettre le résultat du débriefing réalisé au sein de leur service. Pendant ce temps-là, les autres salariés du service rangent leur service.
IV) LA GESTION
A) Calendrier
Période | Activités |
---|---|
Septembre & Octobre |
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Novembre & Décembre |
|
Janvier à Juin |
|
B) Transversalités
Ce projet « Classe-Entreprise » peut être au coeur de l’équipe pédagogique, quelques exemples de transversalités le démontrent :
- Economie-Droit : Forme juridique – Délégués du personnel – Contrat de travail – Règlement Intérieur – Comité d’entreprise – Les partenaires de l’entreprise…
- Arts appliqués : Concours de logo – Packaging des produits
- Prévention-Santé-Environnement : Restaurant d’entreprise
- Espagnol : Achat d’une filiale espagnole - Menu en espagnol pour une semaine à thème dans le restaurant d’entreprise
CONCLUSION
A) Points négatifs
Une des premières difficultés rencontrées lors de ce projet est l’hétérogénéité des élèves. A l’intérieur des services, chacun évolue à son rythme selon ses capacités. Il faut donc parfois intervenir afin de « réguler » les différences d’avancement.
Ce type de projet est difficile à gérer dans le temps et dans le contenu. En effet, la gestion de la progression lors de la 1re année a été réalisée au coup par coup. Il faut davantage avoir une vision globale de l’année avec les compétences acquises.
Pour le professeur (Directeur), le souci majeur est de pouvoir gérer et contrôler plusieurs « services » en même temps. Grâce à l’adhésion et l’autonomie des élèves, cette difficulté s’estompe quelque peu au fil du temps
Ce projet nécessite parfois un investissement des élèves en dehors de la classe mais malheureusement, cet effort est rarement ou superficiellement effectué. De plus, au bout d’un an, la lassitude commence à se faire sentir, les élèves ont besoin de nouveau.
Au niveau de l’évaluation, il est parfois difficile d’être objective à court et à long terme. A un moment donné, l’élève maîtrise la compétence mais qu’en reste-t-il dans le long terme ?
Cette façon de travailler nécessite beaucoup d’implication de l’équipe pédagogique qui est parfois atténué par le manque de temps de concertation et aussi, par la baisse de motivation au fil des mois.
Le volume horaire influence énormément ce projet. Entre la 2nde et la 1re, la classe concernée est passée de 7h à 4h, par conséquent, le temps inductif est réduit.
La dernière difficulté est la gestion de la conceptualisation. Il est incontestable que cette prise de recul est indispensable mais à quel moment la placé ? Suite à mon expérience, mettre le temps de conceptualisation après le temps inductif paraît être le plus pertinent
B) Points positifs
Cette façon de travailler a de nombreux points positifs :
- Meilleure perception et intégration des spécificités de la formation et du métier
- Confrontation aux réalités socio-économiques
- Meilleure motivation et implication
- Dynamique de travail
- Prise de responsabilité et investissement améliorés
- Découverte et compréhension du fonctionnement d’une entreprise
- Meilleure autonomie
Notre société :
Notre site internet :
http://sites.google.com/site/figuedebarbariesarl/
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