Nous entendons fréquemment le terme de pédagogie spiralaire [1], et chacun de nous y met parfois un peu trop de suggestivité. S’agit-il d’approfondissement, de progression, de revoir juste 2 fois une notion ? Jérôme Bruner [2] qui a développé ce concept pédagogique en 1960 voit ses travaux remis au goût du jour dans les recommandations pédagogiques en pré et post-bac en économie et gestion.
Retour sur quelques notions de didactique
La progression conduit à une organisation progressive de savoirs associée à une échelle progressive de difficultés. C’est une manière d’organiser l’enseignement d’une discipline en tenant compte des difficultés associés aux programmes ou aux référentiels.
La programmation suppose une prévision temporelle au cours de l’année des notions, des savoirs, des savoir-faire, des compétences qui seront abordés au cours de l’année, voire du cycle. Cette notion de cycle dans le cadre du baccalauréat professionnel, du cycle terminal en STMG et du BTS prend tout son sens. La planification des enseignements selon les aspects disciplinaires, transversaux et les impondérables circonstances de la vie des élèves et de l’établissement doit faire l’objet d’un travail collaboratif en amont par les professeurs intervenants sur le cycle.
Ainsi, nous en venons au cœur du propos : la pédagogie spiralaire ou plus exactement la programmation spiralaire. Elle se distingue par une organisation pensée et construite du travail par palier des notions. Une même notion est donc abordée plusieurs fois dans l’année et dans le cycle. L’élève à chaque étape peut appréhender la notion proposée en fonction de son niveau de compréhension. La progression dans la complexité se réalise au fur et à mesure et permet de revenir sur les notions vues ; elle se diffère d’une pédagogie circulaire. La programmation spiralaire s’articule parfaitement dans la prise en compte de la courbe de l’oubli d’Ebbinghaus. Elle œuvre pour une meilleure mémorisation.
La différenciation pédagogique est au cœur de l’articulation entre progression et programmation. Si la programmation spiralaire pose le cadre, construire la progressivité nécessite souplesse afin de tenir compte des réalités de chaque élève, de leur différence face à l’apprentissage. Il s’agit donc de définir des objectifs réalistes pour chaque niveau de complexité attendue et d’établir les éléments de remédiation.
Dès lors, le chef d’œuvre au lycée professionnel, les objets d’étude au lycée technologique ou les projets des enseignements professionnels en BTS ouvrent des opportunités de programmation spiralaire pluridisciplinaire. L’approche par cycle prend ici sens.
A partir de ces objets pédagogiques, les différentes notions, compétences sont abordées, vues dans une programmation réfléchie par l’équipe enseignante en amont. Il pourra être intéressant de travailler à partir d’un tableau à double entrée afin de préciser les compétences à acquérir selon le temps, et le niveau de complexité abordée (1,2,3,4). Chaque objet pédagogique proposé permet ainsi de revenir sur les éléments notionnels et de compétences dans une complexité accrue.
Les apports de la E-éducation dans la programmation spiralaire
La e-éducation conduit le professeur à enseigner avec le numérique, et, l’élève ou l’étudiant à apprendre, à produire avec le numérique. L’apprenant est acteur de ses apprentissages, il co-construit avec ses paires les savoirs à partir et grâce à un environnement numérique de travail. La e-éducation porte intrinsèquement une redéfinition des espaces et des temps de l’apprentissage. Elle favorise une progressivité des acquis dans un usage varié d’applications numériques. Avec Monlycée.net, ELEA, la certification PIX et les applications de edu-portail, les apprenants peuvent expérimenter différents moyens numériques leur permettant d’acquérir les compétences visées par le CRCN (cadre de référence des compétences numériques) et par les programmes et référentiels.
Il s’agit donc pour l’équipe enseignante de définir les différentes applications opportunes en correspondance avec les savoirs, les notions visées et la complexité définie dans la programmation spiralaire. Certains outils permettent d’analyser, d’explorer (Pearltrees, …), d’autres de produire des documents collaboratifs écrits, oraux (carte mentale, pad, mur collaboratif, blogs, webradio …). La spirale de la e-éducation [3] proposée par la Dane de Versailles permet de positionner les usages numériques dans une complexité accrue. L’usage des quiz afin de remettre en mémoire les notions déjà rencontrées pourra être un des outils de vérification d’une mémorisation adaptée.
Les apprenants des différents lycées renforcent ainsi leur compétences numériques, professionnelles et leurs savoirs.
Prenons une proposition de mise en œuvre des compétences orales et numériques visées concernant la programmation spiralaire associé à la mise en place du chef d’œuvre, dans une présentation simplifiée liée au TraAm 2021 :
L’exigence et la complexification interviennent sur les 2 ans du cycle pour préparer le chef d’œuvre. Les applications numériques contribuent à garder une trace écrite et audio des productions des élèves afin qu’ils puissent à tout moment les prendre comme point d’appui pour approfondir par la suite.
Il est essentiel de choisir judicieusement les termes [4] de la métalangue [5] et de l’usage de leur fréquentation dans le cycle de l’apprentissage. Ces termes permettent à l’apprenant de conceptualiser les objets scolaires, pédagogiques demandés. Il apprend à reconnaître, à distinguer les caractéristiques d’une notion, d’un savoir, d’une compétence. L’apprenant met ainsi en relation les différentes propriétés notionnelles entre elles. Les métalangues sont variées et souvent associées à une didactique disciplinaire. Le travail de l’équipe enseignante contribue dans le cadre du chef d’œuvre avec le co-enseignement à partager des métalangages et enrichit le savoir collectif de l’équipe pour un accompagnement réussi auprès des élèves.
Les objectifs sont équivalents dans le cycle terminal au lycée technologique. Voici quelques infographies à ce sujet.
A chaque palier, il est fondamental d’y associer différentes outils numériques afin que les apprenants se saisissent de l’ensemble des compétences recherchées dans le cadre du CRCN. Voici un exemple similaire pour un cycle de BTS en commerce international fondé sur 2 ans.
Ainsi, la e-éducation contribue dans le cadre de la programmation spiralaire à sensibiliser, étudier, consolider les apprentissages. L’équipe enseignante dans son travail collaboratif doit identifier les obstacles de l’apprentissage afin de donner les contours d’une spirale qui évolue vers une prise en main des notions, des compétences toujours un peu plus riche.
N’hésitez pas à communiquer vos expériences auprès du creg.ac-versailles concernant les usages numériques dans le cadre de la programmation spiralaire.