Les réseaux sociaux et la gestion de carrière

, par Carine Courtes Lapeyrat

« Arrivé en région parisienne en décembre 2007 sans emploi ni carnet d’adresses, Arnold Yvray décide de s’inscrire sur Viadeo. À 39 ans, ce Dijonnais, cadre intermédiaire dans la logistique, a démissionné pour suivre sa femme, mutée. En six mois, grâce au réseautage en ligne, il se fera 35 relations et décrochera un CDI chez l’équipementier automobile Faurecia. Nulle magie là-dessous. Qu’ils soient professionnels (Viadeo, LinkedIn…) ou plus « amicaux » (comme Facebook ou Copains d’avant), les réseaux sociaux ont le même but : nouer ou maintenir des contacts. Ils tirent leur force de l’effervescence et de l’esprit d’entraide qui y règnent. Il s’y passe toujours quelque chose : les membres modifient leurs pages personnelles, visitent celles des autres, s’écrivent, relaient des informations… et ouvrent même leurs carnets d’adresses, rendant ainsi accessibles des contacts autrefois injoignables. Une manne, quand on connaît le mode d’emploi. » http://webcache.googleusercontent.com

Mais les réseaux sociaux sont-ils toujours des accélérateurs de carrières ? Quels sont les codes, les rituels ou les règles qu’il faut décrypter avant de s’en servir ? Quels sont leurs avantages et leurs risques en termes de gestion de carrière ?

Un réseau social est un ensemble d’identités sociales telles que des individus ou encore des organisations reliées entre elles par des liens créés lors d’interactions sociales. Il se représente par une structure ou une forme dynamique d’un groupement social. Le réseau social peut-être amical ou professionnel. Il permet à l’être humain d’étoffer ses relations, ses connaissances en société.

Le réseau social a toujours existé. Des groupes sociaux, organisés autour d’un thème fédérateur (religion, politique, classe sociale, études, sport, etc.), utilisent un type de réseau informel : recommandation à un tiers, réunions organisées, etc. Le réseau social peut prendre une forme plus organisée et institutionnelle, professionnelle ou « de loisir », payante ou gratuite. Ainsi les agences de rencontres offrent des services de réseautage social à caractère personnel tandis que les agences de chasseurs de têtes offrent des services de réseautage à caractère professionnel. Avec l’apparition d’Internet, les réseaux sociaux ont pris une nouvelle ampleur et leurs formes et possibilités se sont multipliées. Aujourd’hui, ils se développent surtout autour de trois entités : le sport, la politique et la toile.

La constitution d’un réseau social peut être mise en relation avec la pyramide de Maslow. En effet, le regroupement social est une résultante de besoins exprimés par l’individu lui-même. Ainsi, il est possible de mettre en évidence deux des besoins fondamentaux :

  • La socialisation en éprouvant un besoin relationnel. Les utilisateurs peuvent entrer en relation entre eux directement ou par l’intermédiaire d’une connaissance commune. Cette relation publique ou privée est généralement matérialisée par une liste d’amis ou de contacts.
  • L’estime des autres par l’intermédiaire du besoin de communiquer.

À travers cet article, nous allons étudier, dans un premier temps, les réseaux sociaux et la recherche d’emploi, puis, dans un second temps, comment l’entreprise gère ses collaborateurs avec les réseaux sociaux. Enfin, nous verrons quelles sont les limites des réseaux sociaux en matière de gestion de carrière.

 I. Trouver un emploi grâce aux réseaux sociaux.

Une embauche sur deux se fait en France grâce aux réseaux et à la cooptation. Au même titre que la formation et l’expérience, le réseau est un actif clé du capital professionnel. Les relations personnelles et professionnelles que nous avons construites nous fournissent les meilleures opportunités pour trouver un emploi, être plus mobile ou obtenir de nouveaux clients.

A. Construire son réseau.

Avant de vouloir utiliser un réseau relationnel, il convient de le construire. Toute précipitation dans un réseau pourrait être néfaste : il faut d’abord connaître le fonctionnement, les codes, rituels ou coutumes du réseau. Le non initié risque de perdre des contacts utiles s’il ne respecte pas les règles de fonctionnement du réseau.

Les premières bases du réseau relationnel sont à chercher dans l’histoire commune que l’on a avec certaines personnes : l’entourage familial, les camarades de lycée et d’études, les partenaires de loisirs, les anciens collègues, clients et autres personnes côtoyées dans les organisations professionnelles…Il est toujours plus facile de se rapprocher de personnes qui ont des points communs avec vous. Mais il est également important de rechercher des relations qui ont un parcours ou des centres d’intérêt différents.

On peut ainsi distinguer le réseau primaire du réseau secondaire :

  • Le réseau primaire comprend l’ensemble des personnes que l’on connaît et que l’on peut contacter par téléphone. Les personnes du réseau primaire sont celles qui parleront le mieux de nous : famille, amis et relations d’associations, anciens employeurs, collègues, camarades de classes, réseaux des écoles ou universités, maîtres de stages…
  • Le réseau secondaire regroupe toutes les personnes que l’on peut contacter par le biais du réseau primaire et qui ne nous connaissent pas directement. On peut aller les voir « de la part de… ». Ce réseau peut permettre d’obtenir de nouvelles introductions et de générer de nouveaux contacts.

Lorsque ces premiers contacts sont activés, il est ensuite possible de rejoindre des réseaux professionnels déjà existants sur la base de son appartenance métier, de ses centres d’intérêts, de sa culture, etc. Ainsi un PDG pourra adhérer à un réseau de dirigeants, un footballeur pourra adhérer à une association de football, une professionnelle de l’Internet à un club d’entrepreneuses de la nouvelle économie… De même, la fréquentation de chambres de commerce, salons professionnels ou autres colloques peut fournir l’occasion de discuter et de lier de nouveaux contacts ciblés.
Multiples, ces réseaux sont souvent dynamiques et constituent des viviers de contacts porteurs. À partir de ces relations, des partenariats, ponctuels ou durables, pourront être mis en place. Mais il faudra rester patient et savoir donner pour recevoir. En effet, il faut mettre ses compétences au service du réseau, à titre gracieux ou à moindre frais pour intéresser les participants. Ainsi, en 1984, le sociologue américain Robert Axelrod a démontré que la meilleure interaction à long terme entre deux individus était la réciprocité [1]. Si l’on donne du temps et que l’on apporte des compétences au réseau relationnel, alors on suscitera l’intérêt et on pourra ainsi développer la réciprocité.

B. Entretenir son réseau.

Pour entretenir son réseau social, il convient de respecter certaines règles et de consolider son image.

Tout d’abord, il faut avoir le sens de l’échange et respecter les règles de politesse en vigueur dans ce réseau. « L’entretien de son réseau passe avant tout par la communication. Un don plus ou moins naturel, selon les individus. Pour Ludovic Lefebvre, ingénieur d’affaires pour la société de services Sogeti-Transiciel, c’est une seconde nature. « Je crée mon réseau de façon opportuniste : au cours de dîners, d’événements sportifs et de rencontres professionnelles. Il n’y a pas de règles. Cela se fait n’importe où et n’importe quand. Il suffit de savoir saisir les opportunités et d’éviter les maladresses, reconnaît-t-il. Il ne faut pas chercher à se vendre, mais prendre conseil sans s’imposer. » (…)
Mais un réseau relationnel se doit d’être entretenu. Ludovic Lefebvre souligne qu’il faut systématiquement remercier la personne qui vous a reçu quelques jours après la rencontre et, bien sûr, la tenir au courant de la suite des événements. Une simple règle de politesse qui fait souvent la différence, car peu y pensent. Alors, n’hésitez plus. Créez vous aussi votre réseau ! Vous n’avez rien à perdre et tout à gagner. » [2]

L’efficacité d’un réseau se définit par sa capacité à développer son activité. Cela passe par des rencontres avec des personnes décisionnaires (nouveaux clients, fournisseurs, potentiels associés ou futurs salariés…). Pour élargir efficacement son cercle de connaissances, il est conseillé d’appartenir ou de créer un « club », en participant à la vie associative ou, sur Internet, en forme de forum de discussion (« hubs » pour Viadéo). Ces clubs permettent d’échanger des informations et de démontrer son expertise dans ses domaines de compétences. Les associations sont le lieu idéal pour rencontrer des personnes pouvant aider à développer un projet et permettent aussi d’échanger des points de vue, des idées et des cartes de visite. Lorsque l’utilisation du réseau est bonne, ces lieux d’échanges par excellence peuvent aussi favoriser l’introduction vers de nouvelles personnes.
Lorsque le réseau social est numérique, ce sont les plates-formes d’échanges à thèmes qui seront idéales pour mettre en relation indépendants et dirigeants d’entreprises d’une même région par exemple. Mais dans ce cas, il faut passer du virtuel au réel car rien ne vaut une bonne poignée de main. Pour cela, les hubs organisent de plus en plus souvent des rencontres physiques. Certains sites comme Xing ou 6nergies organisent eux-mêmes les rencontres. Ces soirées sont l’occasion de réunir des personnes autour d’un projet ou d’une problématique commune et d’échanger des cartes de visite. Récurrentes, elles s’avèrent très efficaces dans un objectif de développement d’affaires.

Ensuite, il faut tenir ses engagements pour conserver une image irréprochable. En ne tenant pas ses promesses, on risque de ruiner sa réputation et il est ensuite difficile de corriger son image une fois celle-ci erronée.

Enfin, il faut être audacieux pour survivre dans un réseau social. Il faut que les personnes se souviennent de vous de manière positive, qu’elles aient envie de vous rappeler. Lewis Hamilton (formule 1) l’avait compris lorsqu’à 10 ans, il se présente, à l’occasion d’une manifestation sportive, à Ron Dennis pour lui demander d’intégrer McLaren, son écurie de voitures de course.

C. Décrocher un entretien d’embauche grâce au réseau social.

Le réseau social a toujours été, en France, une source de prédilection pour la recherche d’emploi. Autrefois appelé le « piston », les relations personnelles et sociales, développées à travers les loisirs, la famille, les amis, peuvent permettre de décrocher un entretien d’embauche. Les réseaux sociaux sur le web peuvent aussi aider, grâce au tissu relationnel que s’est créé un internaute à décrocher un entretien d’embauche. Mais en aucun cas, ces réseaux, quels qu’ils soient, ne peuvent assurer de décrocher l’emploi. Selon l’APEC, 47% des cadres ont trouvé leur poste grâce à leurs relations personnelles. Et le procédé fait ses preuves : les entreprises reconnaissent que les candidats « recommandés » font de bien meilleurs candidats que les anonymes. A tel point que des groupes lancent des programmes de cooptation pour recruter les cadres : les salariés ayant fait rentrer une de leurs relations reçoivent des chèques cadeaux. Le système est aussi appliqué dans les grands cabinets de conseil et les sociétés de service informatique, voire même dans l’industrie. Le jeu en vaut la chandelle, puisque les candidats rencontrés par ce procédé ont un taux de succès 5 fois supérieur à ceux qui arrivent de l’extérieur.

Mais ce système a ses limites : en institutionnalisant la cooptation, les cabinets et entreprises sont conscients du risque de faire du « clonage ». Par ailleurs, s’il est vrai qu’une direction d’entreprise peut se fier au jugement d’un collaborateur sur d’anciens collègues qu’il souhaiterait coopter, puisqu’il a pu les estimer sur leur capacité à travailler dans un cadre professionnel par ex., on peut par contre douter de ce même jugement à l’égard de ses relations purement et seulement amicales. Et là le « coopteur » peut se mettre dans une situation délicate, risquer de dégrader une relation amicale s’il s’avère que le « coopté » ne passe finalement pas la période d’essai. Le réseau et la cooptation sont donc utiles à manier avec précautions.

Dans la recherche d’emploi, le réseau est donc un atout important. Mais il est important de ne pas y passer toute son temps : il faut définir d’avance le temps que l’on peut consacrer à son réseau relationnel. On ne peut pas toujours être en mesure de répondre à chaque sollicitation, mais il faut faire attention de ne pas refuser toute demande d’aide. On peut aussi proposer le nom d’une autre personne plus à même d’apporter de l’aide.

Pour décrocher un entretien d’embauche grâce au réseau, il est essentiel d’avoir défini son projet professionnel et d’identifier les entreprises qui nous intéressent. Il faut ensuite expliquer ce projet clairement au cercle d’amis ou de relations. On ne pourra accéder à un entretien de réseau qu’en étant persuasif et en connaissant notre sujet. Il faut convaincre le premier interlocuteur pour qu’il puisse proposer une recommandation à d’autres personnes ! L’objectif de cet entretien est de repartir avec des contacts, des informations supplémentaires et de rencontrer des personnes dans les entreprises que l’on souhaite intégrer. Pour recueillir plus facilement des informations, il faut partir du principe que l’entretien est un échange d’informations donc il ne faut pas hésiter à en donner.

 II. Comment l’entreprise gère ses collaborateurs grâce aux réseaux sociaux.

A. Se faire connaître pour attirer les bons collaborateurs.

Utilisés à bon escient, les réseaux sociaux peuvent être très utiles à l’entreprise. Ils permettent de partager les connaissances des salariés en interne, de donner une image positive de l’entreprise au sein des « clubs » professionnels, des associations, des « hubs » professionnels, de recruter, et même de promouvoir les produits au catalogue. Pour réussir le déploiement de ces outils, il faut bien définir le besoin (communiquer, recruter, vendre, faciliter la circulation du savoir en interne, etc.) afin de choisir l’outil adapté et de bien positionner le projet en termes de communication interne".

La mondialisation, l’évolution démographique du personnel et les changements de comportement contribuent à rendre la main-d’œuvre plus mobile que jamais. Il devient très difficile aujourd’hui d’attirer et de conserver les collaborateurs à haut potentiel. C’est pourquoi les entreprises cherchent à valoriser leur image de marque. Aujourd’hui, pour recruter les jeunes collaborateurs, les entreprises doivent se situer au niveau de la séduction, et non plus à celui de l’attraction, et bien évidemment les surprendre.

Les entreprises ont tout d’abord utilisé les réseaux sociaux (professionnels ou numériques) pour leur recrutement, et ce pour deux raisons :

  • la première est que les dirigeants préfèrent embaucher des personnes déjà en poste, or la grande majorité des CV qui arrivent sont ceux de personnes à la recherche d’un emploi,
  • la seconde est la réduction de coût que cela engendre : les DRH ont directement le profil des personnes en ligne, il leur suffit de les contacter et de leur proposer un entretien.

Mais un autre objectif a vu le jour : développer sa notoriété et gérer sa réputation. Les jeunes (et surtout les jeunes internautes) sont aujourd’hui à l’affut de l’actualité des entreprises, de ce qu’il se dit sur leur marque préférée, de l’information en avant première sur le produit qui va sortir. Ils aiment participer, donner leur avis, suivre tout en étant partie prenante.
Des entreprises, comme la SNCF, communiquent aujourd’hui en direction des grandes écoles pour donner envie aux futurs diplômés de rejoindre leurs équipes. TOTAL de son côté a ouvert un compte « Total Careers » sur Twitter sur lequel le groupe publie l’ensemble de ses offres d’emploi.

Une entreprise qui bénéficie d’une bonne image de marque et d’une bonne réputation, bénéficiera, aussi, d’une attraction importante à l’embauche. Cela lui permettra aussi d’influer sur le moral de ses collaborateurs internes et de favoriser la motivation de ses équipes.

B. Recruter grâce aux réseaux sociaux.

Le plus souvent lorsqu’un chef de service a besoin de recruter, il commence par en parler autour de lui, auprès de ses collaborateurs, tout d’abord, puis dans son réseau associatif et amical (« Tu ne connaîtrais pas un bon … qui aurait 5 ans d’expérience ? »). Il utilise aussi parfois les associations d’anciens d’écoles qui regroupent celles et ceux qui ont participé à la vie d’une école. Ces associations publient régulièrement des annuaires dans lesquels figurent les coordonnées personnelles et professionnelles des anciens de l’école qui le désirent. Ces annuaires sont très prisés par les chasseurs de têtes, les cabinets de recrutement et les chefs de service. Ils permettent, en effet, de toucher directement des profils correspondant à leurs besoins. Le chef de service préfère donc sélectionner en priorité des candidats qui lui sont recommandés par des relations professionnelles. Ainsi, il pourra proposer cette personne à sa hiérarchie dès que celle-ci ouvrira officiellement le poste. De la même manière, lorsque l’opérationnel n’a pas de candidat à proposer, la direction des ressources humaines, à son tour, va privilégier les candidats qu’elle connaît ou qui lui sont recommandés. Ce n’est donc que lorsque ces différentes démarches en interne n’ont rien donné que l’entreprise va se résigner à dépenser de l’argent en passant une annonce ou en faisant appel à un cabinet spécialisé.

Aujourd’hui, la création d’un réseau social par Internet se développe. En effet, « si les cabinets de recrutement et de chasseurs de têtes ont été les premiers à s’intéresser aux sites de réseaux sociaux sur Internet, c’est maintenant au tour des entreprises de s’en emparer directement. Elles sont près de 3000 en France à recruter grâce à Viadeo et environ 13000 via LinkedIn, les deux principaux sites de mise en relation professionnelle. Certaines, comme IBM ou Capgemini, sont d’ailleurs présentes sur les deux plates-formes. Le mouvement est bel et bien en marche, même si, au total, seulement 2% des recruteurs utilisent pour l’instant ces outils. Les secteurs des NTIC, de l’informatique et des télécoms sont les plus représentés en France, néanmoins l’industrie s’y met doucement. » [3]. Par exemple, en 2008, Oracle, le leader mondial de l’informatique et des bases de données pour entreprises, a trouvé son directeur général adjoint chargé des finances (chez Oracle, on dit « Vice président, directeur financier »), Jeff Epstein, sur LinkedIn. Un recrutement sur le Net pour un dirigeant de très haut niveau, dont le salaire d’embauche était de 700 000 dollars par an, avec la possibilité de monter à 1,2 million avec les stock-options. En France, le recruteur aurait compulsé les annuaires des anciens élèves de quelques grandes écoles et passé de nombreux coups de téléphone à ses amis et contacts dans les milieux de l’informatique et de la finance.

Ce mode d’embauche par le réseau relationnel permet à l’entreprise d’économiser de lourds coûts de recrutement. De plus, il permet au chef de service de travailler avec des individus qui lui ressemblent et partagent les mêmes idées que lui, ce qui facilite les échanges et l’esprit d’équipe. Collaborer avec des gens qui pensent comme nous fluidifie la vie professionnelle, diminue les difficultés et rassure sur nos valeurs et nos compétences au sein du groupe. Cependant, ceci représente aussi un risque : il ne faudrait pas que tous les collaborateurs se ressemblent trop car cela pourrait empêcher l’expression des différents points de vue et limiter la créativité de l’équipe de travail.

La sélection d’un candidat devrait reposer uniquement sur sa qualification et ses compétences. Cependant, avec le développement des embauches grâce aux réseaux des recruteurs, des dérives apparaissent :

  • le recruteur a souvent accès à des informations personnelles sur la personne qu’il embauche (tissu social, groupes d’appartenances, valeurs, pratiques religieuses, etc.), ce qui peut faciliter ou, à l’inverse, freiner l’embauche ;
  • le recruteur peut, lorsqu’il s’agit de l’utilisation des réseaux numériques, utiliser les moteurs de recherches pour accéder à des informations personnelles sur les candidats (Facebook, Copain d’avant) et parfois même accéder à des pages personnelles de ces candidats.

C. Réseaux sociaux et gestion de compétences.

Le rôle des DRH au sein d’une organisation est d’identifier et développer le capital humain d’une organisation : les compétences, les expériences, les motivations.
Capitaliser des informations sur les compétences, les expériences, les formations des salariés sur un support partagé s’avère très utile pour la fonction Ressources Humaines et globalement pour l’entreprise. La mise à jour régulière est ainsi facilitée. Le réseau social va permettre la création d’annuaires du personnel enrichis avec des profils plus affinés (sports pratiqués, centres d’intérêts personnels, etc.). Ce qui permet par la suite de construire une cartographie des compétences dans l’entreprise et, éventuellement, d’identifier des experts. Capitaliser toutes ces données permet et facilite la mise en relation et la création de communautés liées aux compétences, au profil, dans l’organisation avec l’émergence de nouvelles hiérarchies.
Dans un monde professionnel qui fonctionne aujourd’hui beaucoup en mode projet, le réseau relationnel interne est un bon moyen de mobiliser rapidement et efficacement les personnes ressources. Cependant, dans ce contexte, le service des ressources humaines devra prendre en considération la question de la sécurisation et de la protection des données personnelles de ses collaborateurs.

Pour ce qui concerne les réseaux sociaux numériques, la fonction ressources humaines pourra miser sur eux pour enrichir les profils, mieux cibler les besoins en compétences de l’entreprise et ainsi optimiser la collaboration au sein de l’entreprise. En effet, le réseau social numérique interne facilite la recherche de compétences à l’intérieur de l’entreprise : les profils seront ainsi complétés par les employés eux-mêmes plutôt que d’être remplis par un département de ressources humaines ou par des supérieurs débordés. Alors que certains éléments pourraient être filtrés au passage par différents intervenants, ils demeurent dans le profil. Cela peut paraître futile, mais lorsque nous cherchons des sommes de compétences (exemple : ingénieur + musique + informatique), cela peut aider à faire le bon choix.

Les réseaux sociaux numériques internes peuvent aussi permettre la création de liens malgré des contraintes géographiques. En effet, les entreprises travaillent de plus en plus en gestion de projet avec des équipes délocalisées, donc des contraintes géographiques et horaires fortes.
L’utilisation des réseaux sociaux numériques permet les discussions asynchrones.
Les réseaux sociaux numériques peuvent servir également à créer des communautés d’employés partageant des intérêts communs. Cela peut être relié à un domaine ou encore à des éléments transversaux dans l’entreprise.
Ces espaces permettent aux gens de se rencontrer et de se qualifier sur une plus longue période. Ces liens serviront ensuite à répondre plus vite à la demande. La confiance sera déjà établie. Ces liens peuvent aussi permettre de transmettre le savoir entre générations de salariés. Ainsi, le directeur technique de Numéricube explique que : « Une des entreprises utilisatrices de Twistranet passe par son réseau d’entreprise interne afin de faire travailler l’ensemble des collaborateurs à l’enrichissement du documentaire des processus RH. Cela permet à l’entreprise d’enrichir son capital sans avoir besoin d’investir. C’est une sorte de Wikipédia de l’entreprise » [4]

Le réseau social, qu’il soit numérique ou non, est donc un atout majeur pour le collaborateur comme pour l’organisation.

Pour le collaborateur, il est surtout un déclencheur de contacts lors d’une embauche. Pour l’organisation, il permet à la fois de trouver et de sélectionner rapidement et à moindre coût des nouveaux collaborateurs, mais il peut aussi permettre de faciliter la constitution d’équipes de travail autour de compétences particulières.

Cependant, il convient pour chaque partie d’être prudente quant à l’utilisation des réseaux sociaux. En effet, le réseau véhicule une image pour chaque participant, il convient donc de maîtriser cette image car elle peut très vite devenir un frein dans la carrière professionnelle. Un collaborateur qui semble trop spécialisé aux yeux d’un réseau peut ne pas décrocher d’avancement au profil d’un autre qui aura su mettre davantage sa polyvalence en avant, par exemple. Cette image doit toujours être positive pour favoriser l’évolution de carrière. C’est pourquoi, lorsqu’une promesse est faite sur le réseau social, il conviendra ensuite de la respecter et de s’y tenir. Le réseau doit aussi s’entretenir pour être efficace. S’il n’est pas activé suffisamment souvent, le réseau oublie facilement l’interlocuteur. Ainsi, un outil très facile d’utilisation et toujours apprécié est offert tous les ans par le changement d’année : la carte de vœux est un bon vecteur pour continuer à entretenir son image auprès d’une entreprise dans laquelle on souhaiterait être recruté ou auprès d’un collaborateur que l’on envisage de recruter un jour pour un projet particulier.

Le réseau social pose aussi le problème de la sécurité et de la protection des informations. Il convient, lorsque l’on évolue dans un réseau (clubs, cercles de dirigeants, associations de métiers, associations sportives, réseaux sociaux numériques tels que Viadéo, Xing, linkedin ou twitter), de ne pas confondre ce qui relève de la sphère privée de ce qui relève de la sphère professionnelle. Pour l’organisation, il faudra contrôler les informations qui circulent sur chacun, vérifier la véracité de ces informations et les utiliser à bon escient. Pour le collaborateur, il conviendra de vérifier que le réseau ne véhicule pas de fausses informations le concernant et qu’il n’y a pas de dérive sur les informations qu’il accepte de faire circuler. Ce travail de vérification est à mener quotidiennement pour éviter toute utilisation frauduleuse ou néfaste des informations circulant dans le réseau social.

De plus, il faut garder une certaine distance face au réseau social. Il ne faut pas tout attendre de lui et garder son indépendance, sa personnalité et sa créativité. Les réseaux, comme toute appartenance à un groupe, favorise le besoin de reconnaissance et de ressemblance avec les autres. Une trop grosse ressemblance avec les autres membres d’un réseau pourrait avoir un effet contradictoire avec l’objectif recherché. L’organisation doit rester vigilante et éviter de n’embaucher que des collaborateurs clonés, ce qui risquerait d’être un frein à sa compétitivité et à sa créativité. Le collaborateur doit éviter de trop ressembler à ses « amis » s’il veut pouvoir être distingué et retenir l’attention de manière positive.
Si le développement des réseaux sociaux connaît une forte croissance aujourd’hui grâce aux réseaux sociaux professionnels numériques offerts par Internet, il faut continuer à respecter les règles et les codes sociaux propres à chaque réseau relationnel pour pouvoir évoluer dans ces sphères et être prudent quant à leur utilisation. De tout temps, les réseaux ont pu favoriser ou défavoriser le développement professionnel de collaborateurs.

 Bibliographie.

  • « Facebook, Twitter et les autres... - Intégrer les réseaux sociaux dans une stratégie d’entreprise ». Paris, Pearson. BALAGUE. C, FAYON. D (2010)
  • « Trouver le bon job grâce au Réseau ». Éditions Eyrolles. BOMMELAER. H (2005)
  • « Booster sa carrière grâce au Réseau ». Éditions Eyrolles. BOMMELAER. H (2007)
  • « Réseaux et société ». PUF. Paris. MUSSO. P. (2003)
  • « Réseaux Sociaux Et Structures Relationnelles ». 2e édition. EMMANUEL LAZEGA
  • « Facebook : Mes Amis, Mes Amours, Des Emmerdes : La Vérité Sur Les Réseaux Sociaux ! ». Edition Michalon. Janvier 2010. Olivier LEVRARD
  • « Décrocher un emploi grâce aux réseaux ». Edition Vocatis. 3e trimestre 2010. Aymeric VINCENT.

 Presse :

  • Revue Française De Sociologie N° 49-3, Juillet-Septembre 2008 : Dynamique Des Réseaux Sociaux. Emmanuel LAZEGA
  • Les Echos du 29/07/2010 : Comment Facebook a mis mes habitants de la planète en réseau.
  • Le Monde du 21/06/2010 : Les réseaux sociaux outils de recrutement ? Laurent Checola.
  • The Economist du 25 /09/2008 : Facebook For Suits.
  • Business Social Networking. Livre Blanc. 30 Septembre 2007.

 Sitographie :


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