Panorama des marchés publics

, par Hania Renaudie

Remarques préliminaires :

Cette étude s’inscrit dans le programme de rénovation de l’enseignement du droit en section de technicien supérieur et concerne ainsi le point 322 relatif aux « relations contractuelles avec la personne publique ».
Il s’agit de s’interroger plus précisément sur les éléments suivants :

  • Les modalités de formation du contrat : négociation et marché public, procédures de passation (point 322-2 du programme).
  • L’exécution du contrat : prérogatives de puissance publique, résiliation unilatérale (point 322-3 du programme).

 Introduction :

Le poids des marchés publics dans l’économie française est important et croissant. Selon le dernier rapport public du Conseil d’État de 2008, le nombre de marchés en 2006 était de 178 735 (dont 157 959 de marchés locaux), la plupart d’un montant inférieur à 9000 euros. Le montant global représente 8 % du PIB. Les marchés publics représentent près de 60 milliards d’euros (32 milliards concernent les marchés de l’État, 28 milliards ceux du secteur public local).
L’article 1er du Code des marchés publics, empruntant au vocabulaire communautaire, définit les contrats de marchés publics comme des : « contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs, définis à l’article 2, et des opérateurs économiques, publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services ».
Il importe de relever une distinction opérée par le Code entre les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices. Les premiers désignent l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics [1] et les mandataires [2] publics ou privés. Les entités adjudicatrices s’entendent quant à elles des pouvoirs adjudicateurs qui exercent des activités d’opérateurs de réseaux au sens du droit européen (ex : Service public de l’eau, du gaz, de l’électricité, du transport...).
Par ailleurs, les praticiens sont amenés régulièrement à différencier les marchés publics en raison de leur objet. Il existe par conséquent trois types de marchés publics :

  • Le marché public de fournitures : C’est un contrat ayant pour objet l’achat, le crédit-bail, la location ou la location-vente de produits ou de matériels (ordinateurs, bennes à ordures, produits alimentaires...).
  • Le marché public de services : c’est un contrat ayant pour objet la réalisation de prestations de services (formation des personnels, études, campagne de promotion de la collectivité...).
  • Le marché public de travaux : c’est un contrat ayant pour objet « la réalisation de tous travaux de bâtiments ou de génie civil (routes, ponts, …) à la demande d’une personne publique exerçant la maîtrise d’ouvrage ».

Le marché public est le contrat de droit administratif le plus ancien. Il a fait l’objet d’une première codification par un décret en date du 1 juillet 1964, puis a connu plusieurs réformes d’origine législatives ou réglementaires. En effet, il a été modifié à trois reprises en six ans (2001 [3], 2004 [4] et 2006 [5]) afin de le rendre compatible avec les nouvelles exigences communautaires. Le nouveau Code de 2006 était une nécessité en raison de l’urgence de transposer les deux nouvelles directives communautaires du 31 mars 2004 [6]. Trois décrets de décembre 2008 ont encore modifié le Code des marchés publics pour l’adapter à l’évolution du droit communautaire par une modification des seuils, un allégement des procédures et le développement de la dématérialisation. Soucieux du respect du droit communautaire dérivé [7], le droit des marchés publics connaît donc un renouvellement important de son régime juridique. Les sources nationales, quant à elles, sont d’ordre réglementaire, le Conseil Constitutionnel [8] puis le Conseil d’Etat [9] ont précisé que le recours à la loi n’était pas nécessaire, que cela soit en matière de marchés de l’Etat ou que cela soit en matière de marchés des collectivités locales. D’ailleurs le rôle de la jurisprudence administrative est de plus en plus présent. En ce sens, Jacqueline MORAND-DEVILLER [10] a pu souligner que « la jurisprudence administrative, dont le rôle créateur remarquable dans la première moitié du XXe siècle s’était un peu étiolé, a retrouvé, depuis les années 1990 une nouvelle vigueur, lorsqu’elle fut contrainte de répondre aux questions délicates nées de l’irruption en force du droit de la concurrence. De nouveaux juges, le juge pénal et le juge de la concurrence se manifestent, ainsi que de nouvelles techniques contentieuses liées à l’urgence ». Face à cette nouvelle dynamique, le législateur [11] a souhaité attribuer à l’ensemble des marchés publics la qualité de contrat administratif.
Examiner le régime juridique des marchés publics présente donc un double intérêt. Un intérêt d’une part européen car le droit communautaire souhaite favoriser la concurrence et lutter contre la corruption, d’où les directives secteurs et directives classiques du 31/03/2004 et un intérêt d’autre part national. En effet, les préoccupations européennes ont été transposées en droit français grâce à l’élaboration du nouveau Code des marchés publics qui repose à présent sur un binôme LIBERTE/RESPONSABILITE. Liberté dans le choix des contractants et responsabilité dans le respect des principes fondamentaux de commande publique (liberté d’accès à la commande, égalité de traitement des candidats et transparence de la procédure).
C’est pourquoi il semble intéressant de s’interroger sur la manière dont le droit français tend à s’adapter aux exigences du droit communautaire en matière de marchés publics.
Il importe donc d’examiner tout d’abord, la procédure de passation du contrat de marché public (I) puis ses modalités d’exécution (II).

 I- La procédure de passation du contrat de marché public :

La procédure de passation du contrat de marché public a connu de nombreuses réformes en 2004 et des améliorations en 2006 avec l’élaboration d’un nouveau Code des marchés publics (A) permettant ainsi d’asseoir les différentes procédures laissées au choix de l’autorité publique (B).

A)- Les axes de la réforme de 2004 et les améliorations apportées en 2006 :

La législation en matière de marchés publics est en perpétuelle évolution. Elle doit tenir compte des exigences posées par le droit communautaire et les orientations du pouvoir réglementaire national. En ce sens, l’élaboration du Code des marchés publics repose sur un binôme liberté dans le choix des contractants et responsabilité dans le respect des principes fondamentaux de commande publique [12].

Dans un souci de simplification des procédures de passation des marchés publics, un relèvement des seuils a été opéré. Les seuils sont les montants financiers fixes qui déterminent les procédures applicables à la commande.

  • En matière de marchés de fournitures et de services de l’État : l’acheteur doit obligatoirement suivre une procédure formalisée dès que le montant est supérieur à 135 000 € HT. Avant l’ordonnance du 1er janvier 2006, le seuil était fixé à 90 000 € HT.
  • En matière de marchés publics de fournitures et de services des collectivités territoriales : l’acheteur doit obligatoirement suivre une procédure formalisée dès que le montant est supérieur à 210 000 € HT.

Une proportion plus importante d’achats pourra donc être passée selon une procédure que l’acheteur public pourra librement déterminer. Toutefois, il est important de préciser que ces seuils font l’objet annuellement ou une fois tous les deux ans, d’un ajustement [13].
Toujours dans un souci de liberté laissée dans le choix des contractants, le Code des marchés publics a introduit des souplesses autorisées par les directives européennes « marchés publics ». En effet, le recours à la procédure allégée a été élargi à plusieurs catégories de services comme la formation professionnelle.

En outre, le droit des marchés publics a souhaité approfondir l’exigence de liberté grâce à une simplification des règles de procédures en faveur de l’acheteur public et des entreprises. D’une part, en matière des règles d’évaluation des marchés, l’acheteur doit évaluer ses besoins le plus précisément possible avant de lancer toute procédure de marché. Antérieurement à l’ordonnance du 1er janvier 2006, il devait s’appuyer sur une nomenclature stricte pour évaluer ses besoins. A présent, l’acheteur public doit uniquement justifier de manière personnelle, la cohérence de sa demande avec ses besoins . D’autre part, une simplification a également été mise en place en faveur des entreprises. Désormais, au stade des candidatures, seules deux attestations sur l’honneur leur sont demandées en lieu et place des diverses attestations et certificats. Le régime des avances a été aussi simplifié et ainsi, dès que la marché atteint 50 000 € au lieu de 90 000 €, les entreprises peuvent demander une avance. Et enfin, afin de faciliter aux PME l’accès au marché public, le nouveau Code des marchés publics (2006) a prévu une procédure d’allotissement, c’est-à-dire le découpage du marché en plusieurs sous ensembles de montants plus faibles lorsque le montant initial est supérieur aux seuils des procédures formalisées [14].

Toutefois, face à ses évolutions en faveur de plus de liberté dans le choix des contractants, le droit des marchés publics a souhaité incorporer le pans de la Responsabilité. Cette dernière se matérialise par une obligation de publicité pour tous les marchés comme gage de transparence et de garantie d’une véritable mise en concurrence. En effet, une publication est obligatoire à partir de 90 000 € HT d’achats ; cependant ses modalités diffèrent en fonction du montant financier des marchés :

  • Pour les marchés de fournitures et de services ou de travaux d’un montant compris entre 90 000 € HT et le seuil des procédures formalisées, la publicité est obligatoire au Bulletin Officiel des Annonces des Marchés Publics (BOAMP) ou dans un Journal d’Annonces Légales (JAL). Le pouvoir adjudicateur peut recourir à une publicité complémentaire dans un organe de presse spécialisée.
  • Au-delà du seuil des procédures formalisées, la publicité doit être effectuée au BOAMP et au Journal Officiel de l’Union Européenne (JOUE) et le cas échéant, une publicité complémentaire peut être ajoutée.
  • En dessous de 90 000 € HT, une publicité adaptée à l’objet et au montant du marché est toujours nécessaire mais le choix des modalités de publicité relève de la seule responsabilité de l’acheteur (publication, affichage ou mise en ligne sur son site Web).

Par ailleurs, l’obligation de publicité peut également s’appliquer à l’attribution d’un marché. Ainsi, pour les marchés de fournitures et de services, au-dessus des seuils des procédures formalisées, l’avis d’attribution doit être publié au BOAMP et au JOUE. En outre, chaque acheteur sera tenu de publier, chaque année, la liste des marchés qu’il a attribués et le nom de l’attributaire.

Et enfin, de nouvelles dispositions encouragent la passation électronique des marchés publics. En matière de matériels courants appelés « système d’acquisition dynamique », la procédure est entièrement dématérialisée. Toutes les plates-formes électroniques d’achats publics ont pour obligation d’accepter les signatures électroniques émanant des entreprises labellisées par le Ministère des Finances.

B)- Le choix des procédures laissé à l’autorité publique :

Le Conseil Constitutionnel a souhaité par une décision [15] en date du 26 juin 2003 promouvoir les principes de commande publique [16] au rang de principes constitutionnels. Face à ces exigences, le législateur a accordé à l’autorité publique une certaine liberté dans le choix des procédures de passation du contrat de marché public. Néanmoins, ce choix diffère selon le type de contrat. Il convient donc de distinguer les procédures formalisées et obligatoires (au-dessus d’un certain seuil) de la procédure adaptée (au-dessous de ce seuil), beaucoup moins contraignante pour l’acheteur. Cependant sous certaines conditions, ce dernier peut choisir parmi les procédures formalisées : la procédure d’appel d’offres, la procédure négociée ou la procédure du dialogue compétitif.

  • L’appel d’offres ouvert [17] ou restreint [18] : cette procédure est dite de « principe », elle est basée sur le mieux disant. Elle s’applique obligatoirement aux marchés dont le montant dépasse le seuil de 133 000€ HT pour les marchés de l’État et 206 000€ HT pour les marchés des collectivités locales. La procédure commence par un avis d’appel à la concurrence, publié au Bulletin Officiel Administratif des Marchés Publics (BOAMP) et dans les publications de l’Union Européenne pour les marchés les plus importants. Concernant les critères d’attribution, le prix proposé est un élément parmi d’autres tels que : les garanties techniques, financières, délais d’exécution, expérience professionnelle...etc. En effet, contrairement à l’adjudication, « procédure dite du moins disant » [19], la procédure du « mieux disant » n’est pas uniquement basée sur le prix. D’ailleurs, il importe de préciser que l’adjudication a été supprimée par le Code des marchés publics de 2001. En outre, depuis la réforme de mars 2001, a émergé une procédure dite « du mieux disant social » [20] avec comme critères d’attribution du contrat de marché public : l’environnement [21], l’insertion sociale [22].
  • La procédure négociée : Elle a succédé, en 1976, aux marchés « de gré à gré » qui eux mêmes avaient remplacé les marchés « sur entente directe ». Leur caractéristique est d’échapper à un formalisme contraignant. Elle est définie à l’article 34 du Code des marchés publics [23] et ne peut intervenir que dans des hypothèses limitées : marchés d’études, de recherche, d’expérimentation, de marchés présentant un caractère d’urgence ou de secret [24].
  • La procédure de dialogue compétitif : procédure transposée de la directive européenne de 2004 et codifiée [25] à l’article 36. Elle ouvre des possibilités de discussion avec les candidats et surtout d’adaptation des offres en cours de procédure. Cette dernière ne peut être utilisée que si la personne publique n’est pas en mesure de définir les moyens techniques ou le montage juridique et financier du projet (ex : réalisation d’infrastructures de transport, de réseaux informatiques).
  • La procédure adaptée (sous les seuils) : Sous les seuils des procédures formalisées, les marchés peuvent être passés selon une procédure adaptée, c’est-à-dire une procédure dont les modalités sont « librement fixées par le pouvoir adjudicateur en fonction de la nature et des caractéristiques du besoin à satisfaire, du nombre ou de la localisation des opérateurs économiques susceptibles d’y répondre ainsi que des circonstances de l’achat » [26]. La procédure adaptée remplace les anciens marchés sans formalités préalables du Code de 2001. Elle se distingue de l’appel d’offres par l’allégement considérable de la procédure engagée (par exemple, les pièces à fournir par le candidat sont nettement moins nombreuses, les modalités de la publicité sont choisies par le pouvoir adjudicateur) [27].

Ainsi après avoir examiné les procédures de formation du contrat de marché public, il importe d’en connaître les modalités d’exécution.

 II- Les modalités d’exécution du contrat de marché public :

L’exécution du contrat de marché public est fondée sur le concept de respect de l’équilibre du contrat avec des prérogatives accordées à l’Administration (A) mais aussi au cocontractant (B) .

A)- Les prérogatives de l’Administration :

En matière d’exécution du contrat de marché public, l’administration dispose de quatre pouvoirs :

  • Un pouvoir de direction et de contrôle : Le pouvoir adjudicateur est habilité à surveiller et vérifier la bonne exécution du contrat de marché public. Il peut donc adresser au cocontractant des « instructions » et des « ordres de services ». Toutefois, ce pouvoir n’a réellement de signification que pour des contrats dont l’exécution se déroule sur une certaine durée, comme les marchés de travaux publics.
  • Un pouvoir de modification unilatérale : Le droit commun soumet les contrats privés au principe d’immutabilité, ce qui signifie qu’ils ne peuvent être modifiés qu’avec l’accord des parties. Par dérogation, les contrats administratifs peuvent être modifiés unilatéralement par l’administration en cours d’exécution lorsque l’intérêt général le justifie. Il s’agit du principe de mutabilité [28]. Toutefois, afin de rassurer et de protéger le cocontractant, l’Administration ne peut pas modifier les éléments fondamentaux du contrat ni les éléments financiers. En sus, toutes les charges nouvelles supportées par le cocontractant résultant d’une modification unilatérale doivent s’accompagner d’une compensation financière intégrale.
  • Un pouvoir de sanction : Lorsque le cocontractant méconnaît ses obligations, diverses sanctions peuvent lui être infligées par l’Administration. Elles prennent des formes diverses en fonction de la gravité de l’inexécution du contrat. Le droit a par conséquent prévu trois types de sanctions :
    • Les sanctions pécuniaires  : Elles sont les moins graves. Elles peuvent rendre la forme de pénalités de retard, d’amendes ou de dommages et intérêts [29].
    • Les sanctions dites coercitives  : Elles sont infligées lorsque l’exécution du contrat risque d’être interrompue par le comportement fautif du cocontractant. L’administration soit se substituera à son partenaire défaillant, soit lui substituera un tiers aux frais et risques du cocontractant.
    • La résiliation  : Elle constitue la forme la plus grave de sanction. Elle est prononcée aux torts du cocontractant défaillant après mise en demeure en raison d’une faute (ex : interruption du service ou du chantier, fonctionnement défectueux du service, manquement aux obligations financières...).
  • Un pouvoir de résiliation : cette mesure intervient dans l’intérêt du service et ne doit pas être confondue avec la résiliation-sanction. Aucune faute n’est reprochée au cocontractant et celui-ci devra être indemnisé intégralement [30]. Par conséquent, une résiliation qui ne reposerait ni sur une faute, ni sur un motif d’intérêt général serait irrégulière [31].

Face aux différentes prérogatives détenues par l’Administration, le droit administratif a prévu également des prérogatives au profit du cocontractant afin de s’assurer de l’équilibre financier du contrat de marché public.

B)- Les prérogatives du cocontractant :

Sur le fondement de l’équilibre financier, le cocontractant peut mettre en exergue plusieurs théories administratives devant la juridiction compétente :

  • La théorie des sujétions imprévues : la jurisprudence administrative l’applique aux marchés de travaux. Elle permet d’indemniser un entrepreneur qui doit faire face à des difficultés imprévisibles (instabilité des sols, nappes d’eau souterraines...).
  • La théorie de l’enrichissement sans cause : Le juge administratif applique cette théorie civiliste en matière de marchés publics, lorsque l’entrepreneur a spontanément effectué des « dépenses utiles » [32].
  • La théorie de l’équation financière du contrat ou dite également l’équivalence honnête des prestations : C’est une création doctrinale, elle a été dégagée par Léon Blum dans ses conclusions relatives à un arrêt du Conseil d’Etat [33]. Il s’agit d’une sorte de responsabilité contractuelle sans faute. L’administration qui remet en cause par une décision licite l’équilibre financier du contrat auquel le cocontractant a droit, doit octroyer une indemnité pour compenser la charge annuelle.
  • La théorie de la force majeure : La force majeure se caractérise, comme en droit civil, par son extériorité (en dehors des parties contractantes), son imprévisibilité (cause) et son irrésistibilité (effets) et rendant ainsi, l’exécution du contrat impossible [34]. S’ils sont d’une violence et d’une durée exceptionnelle, les exemples souvent cités sont : ouragans, éboulements, sécheresse.
  • La théorie du fait du prince : On parle d’aléa administratif. Cette théorie correspond à une situation où l’exécution d’un contrat est altérée par une mesure émanant de l’autorité publique contractante [35]. Le fait du prince modifie indirectement le contrat par des mesures extérieures mais qui auront des répercussions sur lui. Il est possible d’illustrer cette théorie par l’exemple suivant : dans le cadre de l’exercice de ses pouvoirs de police, le maire d’une commune peut modifier des trajets de circulation dans la commune et accroitre ainsi les charges d’un service de transports en commun concédé à une entreprise contractante. Cependant, l’aléa administratif a été distancé dans les faits par l’aléa économique.
  • La théorie de l’imprévision : On parle ici d’aléa économique. Cette théorie est une création jurisprudentielle [36]. Elle produit ses effets lorsque, en raison de circonstances extérieures aux parties (différence avec le fait du prince) et non prévisibles, le contrat de marché public connaît un tel bouleversement que son exécution est mise en péril mais n’est cependant pas rendue impossible (différence avec la force majeure).

Un cocontractant ayant subi des bouleversements dans les conditions d’exécution du contrat de marché public peut ainsi revendiquer le bénéfice de l’une des théories précitées afin d’obtenir une indemnisation financière de l’Administration.

 Conclusion :

Le pouvoir réglementaire a su réformer le code de marchés publics par l’adoption de nombreux décrets afin de répondre d’une part aux exigences du droit communautaire et d’autre part aux attentes d’efficience de notre économie. Toutefois, nous pouvons regretter que l’ambition réformatrice soit rester modeste et n’ait pas abouti à un « code de la commande publique » qui aurait couvert également les délégations de service public. Par ailleurs, il aurait été souhaitable que le législateur intervienne pour accorder à cette réforme une dimension législative et non pas seulement réglementaire même s’il a été admis que le recours à la loi n’était pas nécessaire.

 BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages :

  • CODE DES MARCHES PUBLICS, Dalloz, 2010.
  • FOILLARD (P.), Droit administratif, Paradigme, 14e édition, 2009.
  • GUETTIER (C.), Droit administratif, Monchrestien, 3e édition, 2009,
  • LOMBARD (M.), DUMONT (G.), Droit administratif, Dalloz, 8e édition, 2009.
  • MORAND-DEVILLER (J.), Droit administratif, Monchrestien,11e édition, 2009.

Jurisprudences :

  • Jurisprudences communautaires :
    • CJCE, 20 septembre 1988, « affaire Beentjes ».
    • CJCE, 26 septembre 2000, « affaire Commission c/ France ».
    • CJCE, 17 septembre 2002, « affaire des bus d’Helsinki ».
  • Jurisprudences constitutionnelles :
    • Conseil Constitutionnel, « Loi d’orientation et de programmation sur la sécurité intérieure- Non conformité partielle », 22 août 2002 , n ° 2002-460DC.
    • Conseil Constitutionnel, « Loi habilitant le gouvernement à simplifier le droit », 26 juin 2003, n° 2003-473 DC, JO, 03/07/2003, p. 11205.
  • Jurisprudences administratives :
    • CE 10/01/1902 « Compagnie nouvelle du Gaz de Dévillelès-Rouen », GAJA.
    • CE, 31/05/1907 « Deplanque », GAJA.
    • CE, 29/01/1909 « Compagnie des messageries maritimes ».
    • CE, 10/03/1910 « Compagnie générale des Tramways », GAJA, n° 22.
    • CE 21/03/1910 « Compagnie générale française des tramways », GAJA, Rec. Lachaume.
    • CE, 30/03/1916 « Compagnie générale d’éclairage de Bordeaux », GAJA, n° 31.
    • CE, 09/12/1932 « Compagnie des Tramways de Cherbourg ».
    • CE, 02/05/1958 « Distillerie de Magnac-Laval ».
    • CE, 14/14/1961 « Société Sud Aviation ».
    • CE 02/02/1983 « Union des transports publics urbains et régionaux », Rec. Lachaume.
    • CE, 18/01/1985 « Association Le relais culturel d’Aix-en-Provence ».
    • CE, 02/02/1987 « Soc. TV 6 ».
    • CE, 14/06/2000 « Commune de Staffelfelden ».
    • CE Ass., 5/03/2003, « Ordre des avocats à la Cour d’appel de Paris ».
    • CE, 21/12/2007 « Région Limousin ».
    • CE, 22/02/2008 « Tête ».
    • CE, 10/04/2008 « Soc. Decaux ».
    • CJCE, 20 septembre 1988, « affaire Beentjes ».
    • CJCE, 26 septembre 2000, « affaire Commission c/ France ».
    • CJCE, 17 septembre 2002, « affaire des bus d’Helsinki ».

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Notes

[1Il s’agit des établissements publics à l’exclusion des établissements publics industriels et commerciaux (EPIC), groupements d’intérêts économiques (GIE) et les groupements d’intérêts publics (GIP).

[2Ils ont la qualité de représentants légaux.

[3Décret du 7 mars 2001.

[4Décret du 7 janvier 2004.

[5Décret du 1er août 2006.

[6Directives communautaires du 31 mars 2004, n° 2004/17 et 2004/18.

[7Directives communautaires de 1992 et 1993, remaniées en 2004.

[8Décision du Conseil Constitutionnel, 22 août 2002.

[9Arrêt CE Ass., 5/03/2003, « Ordre des avocats à la Cour d’appel de Paris ».

[10MORAND-DEVILLER (J.), « Droit administratif », 11e édition, Monchrestien, 2009, p. 474.

[11Loi MURCEF, 11décembre 2001.

[12Article 1 du Code des marchés publics : « Les marchés publics respectent les principes de liberté d’accès à la commande, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ».

[13Décret n° 2009-1702 du 30 décembre 2009 - art. 1 « Les pouvoirs adjudicateurs passent leurs marchés et accords-cadres selon les procédures formalisées suivantes (…)1° 125 000 € HT pour les fournitures et les services de l’Etat ; 2° 193 000 € HT pour les fournitures et les services des collectivités territoriales »

[14Voir Supra

[15Conseil Constitutionnel, « Loi habilitant le gouvernement à simplifier le droit », 26 juin 2003, n° 2003-473 DC, JO, 03/07/2003, p. 11205.

[16Voir note de bas de page n° 12.

[17Définition : l’appel d’offres et dit ouvert lorsque tout opérateur économique peut remettre une offre.

[18Définition : l’appel d’offres est dit restreint lorsque seuls peuvent remettre des offres les opérateurs économiques qui y ont été autorisés après sélection.

[19Adjudication : procédure aux origines anciennes, reposait sur les deux règles suivantes ; mise en concurrence précédée d’une large publicité et une attribution automatique du marché pour le candidat ayant proposé le prix le plus bas, le « moins disant ».

[20Article 14 CMP : « Les conditions d’exécution d’un marché ou d’un accord-cadre peuvent comporter des éléments à caractère social ou environnemental qui prennent en compte les objectifs de développement durable en conciliant développement économique, protection et mise en valeur de l’environnement et progrès social.
Ces conditions d’exécution ne peuvent pas avoir d’effet discriminatoire à l’égard des candidats potentiels. Elles sont indiquées dans l’avis d’appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation ».

[21CJCE, 17 septembre 2002, « affaire des bus d’Helsinki », il s’agissait d’un marché d’acquisition d’autobus et la Cour a considéré que les critères écologiques pouvait être pris en compte pour apprécier l’offre la plus avantageuse.

[22CJCE, 20 septembre 1988, « affaire Beentjes » ; 26 septembre 2000, « affaire Commission c/ France » : selon la Cour, le « mieux disant social » est un critère qui sert l’intérêt général et que le pouvoir adjudicateur peut insérer parmi les critères d’attribution d’un marché. Elle a admis comme régulière, l’obligation pour le commissionnaire d’employer des chômeurs de longue durée et de participer à une action locale de lutte contre le chômage.

[23Article 34 CMP : « Une procédure négociée est une procédure dans laquelle le pouvoir adjudicateur négocie les conditions du marché avec un ou plusieurs opérateurs économiques ».

[24Article 35 CMP : « Les pouvoirs adjudicateurs peuvent passer des marchés négociés dans les cas définis ci-dessous (...) Les marchés et les accords-cadres de travaux qui sont conclus uniquement à des fins de recherche, d’essai, d’expérimentation ou de mise au point sans finalité commerciale immédiate ; (…) les marchés conclus pour faire face à des situations d’urgence impérieuse liées à une catastrophe technologique ou naturelle ».

[25Article 36 CMP : « La procédure de dialogue compétitif est une procédure dans laquelle le pouvoir adjudicateur conduit un dialogue avec les candidats admis à y participer en vue de définir ou de développer une ou plusieurs solutions de nature à répondre à ses besoins et sur la base de laquelle ou desquelles les participants au dialogue seront invités à remettre une offre.
Le recours à la procédure de dialogue compétitif est possible lorsqu’un marché public est considéré comme complexe, c’est-à-dire lorsque l’une au moins des conditions suivantes est remplie :1° Le pouvoir adjudicateur n’est objectivement pas en mesure de définir seul et à l’avance les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ; 2° Le pouvoir adjudicateur n’est objectivement pas en mesure d’établir le montage juridique ou financier d’un projet ».

[26Article 28 CMP.

[27Voir Supra

[28Ce principe a été posé au début du XXe siècle et réaffirmé à plusieurs reprises par la jurisprudence administrative ; CE 10/01/1902 « Compagnie nouvelle du Gaz de Dévillelès-Rouen », GAJA ; CE 21/03/1910 « Compagnie générale française des tramways », GAJA, Rec. Lachaume ; CE 02/02/1983 « Union des transports publics urbains et régionaux », Rec. Lachaume.

[29CE, 31/05/1907 « Deplanque », GAJA ; CE, 21/12/2007 « Région Limousin ».

[30CE, 02/05/1958 « Distillerie de Magnac-Laval ».

[31CE, 02/02/1987 « Soc. TV 6 ».

[32CE, 14/14/1961 « Société Sud Aviation » ; CE, 10/04/2008 « Soc. Decaux » ; CE, 22/02/2008 « Tête ».

[33CE, 10/03/1910 « Compagnie générale des Tramways », GAJA, n° 22.

[34CE, 29/01/1909 « Compagnie des messageries maritimes » ; CE, 09/12/1932 « Compagnie des Tramways de Cherbourg » ; CE, 14/06/2000 « Commune de Staffelfelden ».

[35CE, 18/01/1985 « Association Le relais culturel d’Aix-en-Provence ».

[36CE, 30/03/1916 « Compagnie générale d’éclairage de Bordeaux », GAJA, n° 31.

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